dimanche 16 septembre 2012

Destins croisés - Episode 7



Je regardais toujours Erick. Ses cheveux brins en bataille étaient épais et une mèche rebelle tombait sur ses yeux d’un bleu profond, qui exprimaient toute la gravité de la situation par leur seul éclat. Un nez aquilin surplombait une bouche bien faite et ses joues étaient rasées de près. Il était grand, bien proportionné, et puissamment musclé comme je l’avais constaté plus tôt. C’était un bel homme même s’il n’avait rien d’extraordinaire. 

- Bon, repris-je, brisant le silence pesant qui s’était installé entre nous. Admettons que tout ceci soit vrai. Qu’as-tu fait pour qu’on veuille ta mort ? Qui sont ceux qui te poursuivent et quel est cet homme qui s’est évaporé je ne sais où ? 
- Je suis ce qu’on appelle un templier. Je maîtrise la magie pour la mettre au service des plus démunis. Je suis le dernier homme libre de mon Ordre, et cette liberté a un coût ; la fuite. 

Qu’est-ce que c’était encore cette histoire de templier et de magie ? 

- Bon ok. Tu es un templier et le dernier en liberté. Quel est le rapport avec ce qui vient de se passer ? 
- Tous les templiers ont été pourchassé et asservis sous les ordres de Cardanas, poursuivit Erick en ignorant ma question. Dans un premier temps, il réussit à convaincre quelques templier, haut placés dans l’Ordre, de se joindre à sa cause. Ensuite, il tenta les plus faibles d’entre nous en leur promettant richesse, pouvoir et prospérité sur des générations. Puis, il allia les premiers pour vaincre les plus résistants d’entre nous. Ce fut un véritable massacre. Certains périrent dans d’atroces souffrances, d’autres furent brisés et asservis. Nous avons été très peu à réchapper de cette éradication. Ceux qui restèrent furent pourchassés comme des assassins. Sans cesse obligés de fuir, certains finirent par céder. Soit par cupidité, soit par désespoir. Il y a maintenant trois ans que le dernier compagnon qui fuyait à mes cotés fut rattrapé par les sbires de Cardanas. Jusqu’au bout il aura vaillamment lutté, ajouta-t-il avec émotion. Je n’avais plus le choix, courir le pays n’était plus une solution, il fallait que je fuie davantage et c’est ici que je suis venu. 

J’avais du mal à avaler ses salades, mais je jouai le jeu, prête à voir jusqu’où il irait dans ses histoires à dormir debout. 

- J’ai dû louper un chapitre quelque part, mais comment passe-t-on de ton monde au mien ? Dans un claquement de doigt ? demandai-je avec sarcasme. 

Erick répondit sans relever ma remarque acerbe. 

- Grâce à la magie. Par moment, certains endroits sont fortement liés l’un à l’autre, au delà les univers. On appelle cela un trou dans l’espace. Ce sont comme des portails qui s’ouvrent pour faire le pont entre deux univers. Ils peuvent prendre des formes très différentes. Ils peuvent être objets, minéraux, végétaux, mais jamais animaux ni humain, du moins en théorie, mais peu importe, dit-il en balayant l’air de la main. Dans le cas présent, le livre que tu as trouvé chez moi est un portail en direction de mon monde. Et je ne sais pas encore comment, mais visiblement Cardanas a trouvé un moyen d’établir un lien permanent qui lui permet d’envoyer sa garde rapprochée à n’importe quel moment et n’importe où… La première attaque a eu lieu deux jours plus tôt alors que je rentrais du travail, ajouta-t-il plus pour lui-même que pour moi. 

Je réfléchis à toute vitesse, essayant de trouver un élément incohérent à son récit. 

- Si le lien entre ton monde et celui-ci se fait à travers le livre, comment expliques tu que l’homme que j’ai tué soit apparu près de toi, dans la rue, et pas dans ton appartement, près du portail ? 

Erick haussa les épaules. 

- Je me pose la même question, et je n’ai pas réponse à tout. J’espère pouvoir élucider ce mystère avant que cela ne prenne des proportions trop dramatiques. Je ne comprends pas encore quel procédé utilise Cardanas pour envoyer ses hommes ici, tout ce que je sais c’est que j’avais posé un sceau sur le livre pour verrouiller le passage, et qu’en revenant ici le livre n’était plus à sa place, et le sceau brisé. 

J’avais bel et bien touché au livre oui, mais je n’avais rien remarqué de particulier dessus, et il ne me semblait pas qu’il ait changé tandis que je le manipulais avec soin. Et puis en toute logique, l’attaque avait eu lieu avant que je vienne fouiller dans son appartement ; le sceau avait donc déjà disparu à ce moment là. Voilà que je me mettais à raisonner comme si toute cette histoire était vraie. 

- Rien ne t’oblige à me croire, mais tu voulais la vérité ; la voilà, dit-il devant mon scepticisme. 

Je fis une moue dubitative. 

- Et qu’est devenue l’espèce de molosse à la grosse épée ? Je ne l’ai pourtant pas inventé, ma chemise est encore pleine de sang, ajoutai-je en repensant au torchon imbibé que j’avais jeté dans la baignoire. 

Erick m’observa un moment avec un léger froncement de sourcils. 

- Non, tu ne l’as pas inventé, en effet. Il s’appelait Joastin, fût un temps il était templier tout comme moi, mais c’était également l’un des plus faibles de notre ordre. Il a été l’un des premiers à céder devant l’attrait du pouvoir. Son âme repose aux Enfers désormais, et son corps s’est évaporé pour rejoindre la matière de son monde d’origine. Les choses reprennent leur cours. 
- Je suis désolée Erick. Je n’arrive pas à croire à toute cette histoire tirée par les cheveux. Ça ne peut pas… ce n’est pas ainsi que vont les choses. Pour moi tu n’es qu’un collègue de travail à qui il manque une case. 

Erick s’esclaffa et se leva pour se planter devant moi. 

- Je te remercie pour ta franchise. Mais le collègue à qui il manque une case n’a pas besoin que tu le crois. Je te mets juste en garde contre les dangers que tu cours à présent. Cardanas a forcément vu ton visage à travers l’esprit de Joastin, et crois-moi il ne t’oubliera pas, il essayera de te retrouver et il te tuera. Ce ne serait qu’un échange de bons procédés pour lui ; tu as tué l’un de ses soldats, ce ne serait que justice que tu meurs à ton tour. 

Je frissonnai devant de telles paroles froides. Dans quel monde vivait-il donc ? Comment pouvait-on être dérangé à ce point et paraître si sain d’esprit ? Je n’étais pas forcément un exemple en la matière, mais il y avait des limites à tout. 

- Bien, maintenant que je sais tout et que ta blessure est bandée, tu peux partir, comme promis. 
- Ho non, après ce qu’il vient de se passer, il n’est pas question que je te laisse seule ici. Si je pars, Cardanas aura la voie dégagée pour te supprimer. 
- Qu’est-ce que ça peut te faire ? répliquai-je cinglante. Je ne suis rien pour toi, juste une femme d’un autre monde qui n’a rien à voir avec toi, une étrangère. Alors tu peux t’en aller et si un second Joastin pointe le bout de son nez ici, j’en fais mon affaire. 

Erick ria aux éclats et déclara qu’il n’avait aucun doute là-dessus. 

- Il n’empêche que je me sens responsable de toi maintenant, et je ne bougerai pas d’ici tant que tu ne seras pas prête à me suivre. 

Je le toisai du regard. Sa décision semblait le contrarier, mais il n’en était pas moins déterminé. 

- Je n’ai besoin de personne et tu n’es pas responsable de moi. 
- Soit, déclara-t-il en haussant les épaules. Je ne bougerai pas d’ici à moins que tu ne me menaces avec ton couteau. 

La plaisanterie ne me fit pas rire. Furieuse de ne pas avoir eu le dernier mot je m’isolai dans la cuisine pour préparer quelque chose à manger ; il était 16 heures et mon estomac criait famine après s’être lamentablement vidé dans les toilettes. J’avais quelques restes de ratatouille préparée la veille, et du blanc de poulet, que je fis revenir dans un wok. Cela suffirait bien pour nous deux. Erick me rejoignit dans la cuisine lorsque le repas fût prêt, et nous mangeâmes en silence. Je contemplai d’un regard neuf mon collègue de travail. Et si c’était vrai ? Après tout, quel intérêt avait-il à inventer une telle histoire ? Je ne lui avais jamais connu d’ami, ni même de fiancée, et la fouille de son appartement m’avait confirmé la chose. Personne ne venait le voir au travail, même ses collègues l’ignoraient royalement. Moi-même je ne lui avais porté qu’un intérêt modéré jusqu’à aujourd’hui. 

Je fis la vaisselle en silence et m’enfermai dans ma chambre. Erick se débrouillerait seul s’il voulait rester ici. Je mis un peu de musique pour méditer et m’allongeai sur le lit. Si je n’étais pas virée du travail j’aurais de la chance. Je pourrai toujours prétexter cette fameuse migraine fulgurante, mais les hordes de caméra qui envahissaient tous les lieux publics n’auront pas oublié mon passage chez Albert, et après une petite enquête de routine on retracera tôt ou tard mon parcours, et on remontera jusqu’à Joastin, et mon acte barbare. Fatalement. Alors je serais de nouveau fichée, une enquête spéciale serait ouverte à mon sujet, et ma vie entière sera passée au crible par les loupes des experts en tous genres. Je n’aurais plus aucuns secrets, et de vieux souvenirs reviendraient au grand jour… sauf si… Non, inutile d’y penser, ce serait pure folie. 

Sur ces pensées chaotiques je me sentis plonger dans les limbes embrumés du sommeil, et j’y glissais avec ivresse, persuadée que demain tout reviendrait à la normal.

***

Cela faisait longtemps que je n'avais pas dessiné sur papier, et ce n'est pas désagréable ! C'est brut de décoffrage comme on dit, mais peut-être que je ferais des retouches sur photoshop plus tard.

Ha et pour infos, pour ceux qui n'avait pas reconnu le dessin, c'est tiré des Forêts d'Opales, d'Arleston et Pellet. J'aime beaucoup l'univers et les dessins de cette série !

lundi 10 septembre 2012

Destins croisés - Episode 6



Je retrouvai Erick affalé sur le canapé noir – le noir était décidément une couleur seyante –, il avait l’air soucieux. Il avait enfilé un pull et changé de pantalon. Je regardais autour de moi. Aucune trace du colosse que j’avais tué ; aucune trace de sang, aucune trace de lutte, était-ce donc un cauchemar ? Mais non, je n’avais pas rêvé, mon couteau de cuisine trônait sur la table basse, encore plein de sang. Erick se leva et s’approcha de moi. 

- Ça va ? demanda-t-il doucement. 

Je balbutiai. 

- Oui,… je crois. Mais… où est-il passé ? Qu'est-ce qu’il voulait ? Qui était-ce ? Que… 

Erick se leva et me prit par les épaules. 


- Je t’avais dis de ne pas t’en mêler. Voilà à quels risques tu t’exposes en m’aidant. Maintenant ils vont chercher à t’éliminer, tu t’es dressé comme un obstacle entre eux et moi, ils ne te laisseront pas tranquille. 

- Mais de qui parles-tu à la fin ? m’énervai-je. Qui te recherche ? En quoi t’aider met ma vie en danger ? Qui était cet homme ? Je… je l’ai tué, alors où est-il maintenant ? Il n’a pas pu disparaître ainsi ! 


Ma gorge se noua mais mes yeux restèrent désespérément secs. Je n’étais pas faible ! 

- Eléonaure ! 

Erick me sourit, et ce simple geste suffit à apaiser mon esprit torturé par l’acte morbide que j’avais exécuté avec tellement de rage et de sang froid en même temps que ç'en était effrayant. Ses doigts caressèrent ma joue avec douceur. Je me dégageai sans délicatesse et posai un index accusateur sur sa poitrine, en le regardant droit dans les yeux. 

- Qui es-tu à la fin ? Je n’ai rien trouvé d’intéressant dans ton dossier à l’agence, et je ne vais pas me contenter de ça, après ce que je viens de faire pour toi. Alors je t écoute. 

Je croisai les bras et pris un air déterminé pour lui montrer que je n’abandonnerai pas tant que je n’en saurais pas un peu plus. Erick de rassit sur le canapé et passa une main lasse sur ses yeux. Visiblement ce qu'il avait à me dire ne l’enchantait guère, mais je me fichai éperdument de ses états d’âme ; j’avais tué un homme de sang froid et j’estimai que j’avais le droit de savoir pourquoi. 

- Tu ne me croiras jamais et tu me prendras pour un fou. Oublie ça. 

- Hors de question. Tu me dois des explications et je les écouterai quoique tu dises. J’en jugerai après. 

Erick se pencha en avant et posa une main sur son bandage. 

- Comme tu veux. Après tout je n’ai rien à perdre dans l’affaire, et tu as déjà fait ton choix…Je viens d’un autre monde, d’un autre univers que le tien. Là d’où je viens, certaines personnes veulent ma mort et je me suis réfugié ici dans ton monde. C’est pour cela que tu n’as rien trouvé sur moi. Ici je n’ai pas de passé, pas de famille. 

- Arrête de me prendre pour une cruche. C’est un conte à dormir debout que tu me chantes là. 

- Je te l’avais dit. 

Un silence s’installa entre nous. Je dévisageai un peu plus Erick en me remémorant quelques détails. Deux ans plus tôt, il était arrivé fraîchement diplômé à l’agence, pour un entretien d’embauche. Enfin c’est ce qu’il avait prétendu en brandissant un bout de papier cartonné, signé et tamponné par le Haut Directoire. Il avait réussi l’entretien avec brio et on lui avait attribué le bureau voisin du mien. A cette époque j’étais également toute jeune à l’agence et le rythme des longues journées était éprouvant. J’avais alors pris l’habitude de démarrer la journée avec un café bien serré pour me maintenir éveillée jusqu'au déjeuné. La complicité avec mes collègues m’était quelque chose d’inconnu. Ils n’avaient pas fait un geste envers moi et de mon coté je n’avais pas non plus été très engageante. Un matin, quelques semaines après l’arrivée d'Erick, je trouvai un café posé sur le bord de mon bureau. Ce petit geste était devenu un rituel et j’avais appris à l’apprécier pour ce qu'il était. J’avais alors cru que mes rapports avec mon voisin de bureau se développeraient vers quelque chose qui ressemblerait à de l’amitié, mais non, il se contenta de son bonjour matinal et de quelques sourires dans la journée. J’avais respecté son silence et accepté son attitude. Plus d’une fois la curiosité m’avait piquée mais je n’avais jamais franchi le pas. Aujourd'hui plus qu'une occasion, c’était une nécessité de savoir qui il était, et j’allais bêtement passer à coté si je continuai à réagir ainsi.

La suite du récit et la suite du work in progress. J'ai commencé la colo, mais j'avoue que je m'empêtre un peu et je n'arrive pas au résultat que j'aimerai obtenir. Mais bon, comme d'habitude, j'essaye quand même, car ça ne coûte pas grand chose !

mercredi 5 septembre 2012

Destins croisés - Episode 5


Ce qui semblait être un homme vêtu d’une armure métallique menaçait mon collègue de travail avec une immense barre de métal qu’il tenait à deux mains. Elle brillait de mille feux. Cela me rappelait vaguement les épées qui illustraient les vieilles bandes dessinées. Il dominait Erick de deux têtes et ses mains gantées tenaient fermement la garde en argent de son arme. Ce qui devait être un heaume en fer blanc surmonté de plume rouge, cachait son visage et son cou. Néanmoins une longue natte tressée en sortait et se balançait dans son dos. Mais comment n’avais-je pas pu l’entendre entrer ? 

- Hey ! Qu’est-ce que vous faites chez moi ? 

Je n’aurais pas trouvé mieux si j’avais voulu paraître aussi idiote que j’en avais l’air, campée sur mes jambes devant le salon, avec mon grand couteau de cuisine dans une main. Le géant se retourna et me regarda quelques instants avant d’éclater d’un énorme rire gras. Oui, décidément j’étais vraiment une imbécile, et le regard que me lança Erick me confirma la chose. Et dans ces cas-là, autant l’être jusqu'au bout. 

- Je ne sais pas qui vous êtes, et ce que vous voulez, mais je vous prierai de bien vouloir sortir de chez moi, dis-je en pointant la porte du doigt. 

Le colosse en armure, qui menaçait toujours Erick de son épée disproportionnée, s’esclaffa de nouveau. 

- Elle me prie de sortir de chez elle ! Haha ! La bonne blague ! Tu n’as donc pas trouvé mieux pour te défendre qu'une misérable femme tout juste bonne au fourneau ? Non, Eryck tu me déçois cette fois, j’attendais mieux de ta part que ça ! dit-il en me désignant de la tête. 
- Hey ! Ici c’est chez moi, et votre place est dehors ! 

Je ne sus jamais ce qui me passa par la tête à ce moment-là ; je m’avançai d’un pas décidé pour le tirer par le bras en direction de la sortie. 

- Tu es vraiment pathétique Eryck ! 

Le géant souleva son énorme bras et me décocha un formidable revers de main qui m’envoya à l’autre bout de la pièce. Ma tête tapa contre le mur et je fus prise de haut le cœur en tentant de me relever. Le choc résonnait dans tous mes os et mon crâne semblait sur le point d’éclater. 

Erick et l’intrus m’avaient déjà oubliée, me laissant à mes nausées et mes douleurs. Je pris appui contre le mur et tentai une nouvelle fois de me relever. Je tenais à peine sur mes jambes mais ce fût suffisant pour récupérer le couteau qui avait glissé au sol à quelques centimètres de moi. Je vis vaguement Erick lever ses deux mains devant lui tandis que le géant abattait sa lourde épée sur sa tête. Il aurait dû mourir, oui c’est ce qui aurait dû se passer… normalement…, mais non ce n’est pas ce qui se passa. Contre toute attente, l’épée resta figée dans les airs, et le colosse semblait être à la lutte pour exécuter son coup. J’évaluai la situation rapidement et froidement. Sautant probablement sur la seule ouverture qu’il me laisserait, je bondis sur son dos et abattis le couteau à maintes reprises entre son armure et son heaume ; le seul endroit où il était vulnérable. Des gargouillis s’échappèrent de sa gorge et une gerbe de sang gicla dans ma direction. Le colosse battit vainement des bras dans le vide puis s’écroula à mes pieds… mort. 

Je regardai Erick, il avait l’air d’aller bien si on oubliait sa blessure au ventre, dont le bandage avait pris une couleur rougeâtre. Je regardai l’énorme masse étendue à mes pieds, une marre de sang grandissait sous l’homme au heaume. Je regardai mon couteau, plein de sang qui gouttait au sol. Mon regard allait de l’un à l’autre. Était-ce un rêve ? Comprenant soudainement ce que je venais de faire je lâchai prestement mon arme de fortune et regardai mes mains tachées de sang elles aussi. Je tirai sur ma chemise blanche, elle était également tâchée de sang. Bon Dieu qui n’existe pas, était-ce un cauchemar ? Je portai une main à la bouche et prise de violente nausée je courus au toilette. Mon estomac se vida de tout son maigre contenu. Les veines battaient sourdement à mes tempes, les yeux me piquaient, et mes mains tremblaient sur le bord de la cuvette. Les souvenirs remontèrent à la surface avec une violence inouïe. Je vomis une dernière fois, puis mon estomac, une fois assuré d’être réellement vide, me laissa en paix. 

Je gagnai la salle de bain et me rinçai la bouche ; du sang constellait mon visage et mes cheveux. Toute abasourdie, la réalité semblait être difforme. En détachant les boutons de ma chemise j’eus l’impression d’être dans le corps d’une autre femme, et d’assister passivement à ses gestes. Cette femme hystérique se frotta énergiquement les cheveux pour enlever les traces immondes de la violence qui avait eu lieu. Elle se déplaça mécaniquement jusqu'à sa chambre et enfila un T-shirt à manche longue noir. Oui, le noir c’est une couleur seyante. Elle inspira un grand coup et sembla me happer dans les méandres de son esprit, nos âmes se mêlèrent et je ne fis plus qu'une avec elle. J’étais de nouveau elle, elle était de nouveau moi, j’étais de nouveau moi. Les souvenirs se dissipèrent peu à peu. Cette fois, je devrais bien affronter la réalité de mes actes. Ce ne serait pas sans conséquence, car je n’aurais pas d’issue de secours. Même avec l’avocat le plus pourri de la Cité, traînant dans les meilleures magouilles et étant dans les petits papiers des juges, j’étais bonne pour la zone de stockage définitif. Car Damien ne viendrait pas à mon secours cette fois.

Le work in progress ne correspond pas vraiment à l'épisode, mais c'est tout ce que j'ai à montrer en ce moment !