dimanche 3 février 2013

Destins croisés - Episode 14



***

Je me réveillai un peu plus tard dans la journée. L’une des prisonnières était penchée au dessus de moi, et essuyait le sang qui avait coulé le long de ma tempe. Je l’observai un moment, les paupières mi-closes ; elle devait approcher la trentaine, les cheveux châtains clairs attachés en queue de cheval, de grands yeux verts, des taches de rousseur rehaussant la ligne d’un nez fin, et une bouche pulpeuse. A n’en pas douter, elle aurait fait fureur dans mon monde. 

Voyant que je reprenais connaissance, elle s’écarta et se rassit contre les barreaux de la cage. Je regardais les autres prisonniers ; ils arboraient tous la même mine triste et fatiguée. Les femmes étaient vêtues de longues jupes et portaient une chemise ample serrée à la taille par une bande de tissus fin pour la plupart de couleur vive. Un fichu de la même couleur que leur ceinture retenait leurs cheveux en queue de cheval. Les hommes étaient vêtus à peu près de la même façon. A la place de la jupe, ils portaient un pantalon rentrés dans des bottes en tissus ou en cuir qui s’arrêtaient à mi-mollet. Ils avaient tous le teint hâlé, comme s’ils avaient l’habitude d’être exposé au soleil. 

- Où nous emmènent-ils ? demandai-je d’une voix pâteuse. Que vont faire ces hommes de nous ? 
- Tu n’as jamais entendu parler des Enleveurs ? s’étonna la femme qui s’était penchée au-dessus de moi, en insistant sur le dernier mot. 
- Des enleveurs ? répétai-je. Qu’est-ce que c’est ? 
- Cela fait plusieurs mois qu’ils courent la campagne pour enlever les paysans, répondit un jeune homme aussi épais qu’une brindille. 
- On raconte qu’ils les emmènent jusqu’à la frontière sud, et qu’ils les vendent comme du bétail aux Dabaïens. C’est le sort qui nous attend, chuchota une femme brune en frissonnant. 

Je me redressai péniblement et agrippai les barreaux de la cage, qui tanguait sous l’impulsion des grandes créatures. Des Enleveurs ? Se faire vendre à des Dabaïens ? Dans quelle merde étais-je ? J’observai longuement les hommes qui encadraient le convoi. Ils étaient tous taillés dans le roc, et leur attitude agressive me dissuadait de tenter quoique ce soit frontalement. De plus, ils avaient l’air plutôt organisés. De temps en temps, deux d’entre eux partaient devant en reconnaissance. Ils revenaient une heure plus tard en hochant la tête positivement. Cinq autres hommes encadraient étroitement le convoi, et les derniers s’espaçaient d’une cinquantaine de mètres pour surveiller les environs, si bien que la plupart du temps je les perdais de vue, pour les voir réapparaitre de temps en temps dans les sous-bois alentour. Je devrais la jouer fine si je voulais me sortir de ce mauvais pas. Lasse de les regarder, je ramenai mes genoux contre ma poitrine en soupirant. Merci Erick. 

- Comment t’appelles-tu ? demanda alors la femme aux cheveux châtains. 
- Eléonaure. Et toi ? 
- Eléonaure ? Ce n’est pas commun. Je m’appelle Sarizine, et je viens du village de Tenezco. Et toi d’où viens-tu ? ajouta-t-elle alors que je gardais le silence. 
- Pari, répondis-je d’une voix lointaine. 
- Pari ? Où est-ce ? demanda un jeune homme aux cheveux couleur carotte. 
- Loin. A des années lumières d’ici. 

Devant mon air maussade les questions s’arrêtèrent. Je sentais les regards pesés sur moi. Accoutrée comme je l’étais et la peau blanche, j’intriguais tout le monde. Je fermai les yeux et tentai de faire le vide dans mon esprit.

Et voilà le work in progress terminé.

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