dimanche 21 novembre 2010

La marche d'Asirilis



Les hurlements et les cris de désespoir résonnaient encore dans sa tête. Pourtant deux jours s'étaient écoulés depuis que l'avant-garde asirilonne avait mis à sac le village. Deux jours durant lesquels une seule question la hantait. Pourquoi avait-elle survécu ? Pourquoi les soldats la retenaient encore captive sous une tente bien gardée, alors que tous les villageois avait été massacré. Sans exception. Femmes, enfants, vieillards. Tous y étaient restés dans d'atroces souffrances.
Louve n'aurait pas pu dire qu'elle regrettait les morts, mais elle ne supportait pas les injustices. Et les villageois, même s'ils n'avaient pas eu beaucoup d'égards pour elle, n'avaient pas mérité un sort aussi cruel. Pour la plupart, ils étaient paysans ou commerçants. Personne n'espérait faire fortune en arrivant à Eryl. Alors pourquoi cette haine viscérale dans le regard des soldats pour les cadavres mutilés, déchiquetés, et violés qu'ils avaient rassemblé afin de les brûler ? Cette question restait sans réponse. Et à mesure que le temps avançait, la rejetonne se demandait quelle fin lui réservait ces hommes sanguinaires pour qu'ils la retiennent captive de la sorte.
En deux jours, elle n'avait vu personne en-dehors du soldat qui lui avait apporté une ration de nourriture tout juste suffisante pour un enfant de dix ans. La jeune femme avait cependant compris qu'ils espéraient gagner rapidement le coeur de la Province pour défaire l'élite de l'armée du Deuxième Seigneur de Guerre d'Evène. Cette victoire assurée, les hommes d'Asirilis pourraient marcher sereinement, sur les Provinces adjacentes. Un avenir guère réjouissant pour les évènois.
Elle essaya une fois de plus de défaire ses liens autour des poignets, mais elle ne réussit qu'à resserrer encore plus le noeud. Plus elle cherchait à s'en extraire, plus les cordes lui rentraient profondément dans la chair.
Au loin un hurlement de loup se fit entendre par-dessus les bruits du camp militaire. L'espace d'un instant un étrange silence pesa sur l'agitation des soldats. Des points de suspension dans la ligne du temps. Puis chacun reprit le cours de ses activités comme si de rien n'était.
Ysis n'était pas loin, et ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle passe à l'action avec ses fils. Sa petite ne resterait pas longtemps dans les griffes des asirilons.
Sourire en coin, Louve ferma les yeux.

Voilà enfin la première tenue (et en couleur s'il vous plait ! ^^) de Louve et un petit extrait de ses futures aventures qui sont loin d'être gravées dans le marbre.

vendredi 12 novembre 2010

Lueur d'espoir - Episode 10



- Hey ! Toi là-bas ! Ne bouge pas !

Je m'arrête. La chance ce n'est pas mon truc en ce moment. Si ça continue, il va falloir que je m'achète une patte de lapin ou une babiole dans le genre pour qu'elle me sourie un peu plus.

- Arrête-toi et lève les mains salope ! Qu’est-ce que tu transportes ?

Je dois la jouer fine si je veux survivre, car ils n’ont pas l’air d’être de bonne humeur. Je prends une bouffée d’air avant de répondre calmement.

- Je tiens une petite fille dans mes bras. Je vais la poser au sol et me retourner lentement.

Je n'espère pas trop, mais je dois bien tenter quelque chose.

- Qu’est-ce que tu fous ici avec une gamine ? me crie l’un des soldats.

Je dépose la fillette au sol et lève les mains en me retournant doucement. Qu’elle n’est pas ma surprise quand je me rends compte que ce ne sont pas des hommes du PPNG mais de l’OPPI ! Que viennent-ils faire ici ceux-là ?

- Répond ! Qu’est-ce que tu fous là ?!

Je trésaille sous l’intonation haineuse du soldat. Il n’a vraiment pas l’air de vouloir plaisanter celui-là…

- Je cherche à rejoindre un camp de réfugié…
- En cherchant dans les égouts ?

La voix du soldat est sceptique. Il est de plus en plus méfiant et ça ne sent pas très bon pour mes fesses. J'entends un déclic. Il a dégainé son arme et pointe le canon sur moi. Bon, si demain arrive un jour je m'offre une patte de lapin, ou un trèfle à quatre feuilles. Tiens ! Un trèfle à quatre feuilles c'est bien mieux qu'une patte de lapin, pauvre bête ! La fillette se met à pleurer de plus en plus fort. A présent ils sont tous les quatre à avoir dégainé leur arme et à s'approcher, l'air menaçant. Je tente une dernière chose.

- Vous êtes des hommes ?
- Quelle question ma belle ! Ça ne se voit pas ? ricane celui de droite.

Je baisse une main et attrape un couteau de chasse glissé dans l’une de mes bottes.

- Prouvez-le-moi alors ! Vos joujoux autour de la taille ne sont pas là pour faire joli !

Avec la pointe de mon couteau je désigne leurs sabres qui pendent négligemment à leur taille. Les soldats s'arrêtent, se regardent, hésitent.

- Quoi ?! Ne me dites pas que vous avez un doute sur l’issu d’un affrontement à quatre contre un...! Je suis si impressionnante que ça ?

Je prends une attitude nonchalante et méprisante. Mon ton est presque rieur. Pourtant en moi-même je prie pour ne pas m’être trompée sur leur compte. Après un moment d’hésitation je sens la colère monter en eux. Je crois que j’ai visé juste ! Ils jettent leur revolver au sol et empoignent les sabres accrochés à leur taille, le regard plein de haine pour la femme qui ose les défier. Je les attends de pied ferme. Dans un cri de rage ils se lancent sur moi. Je ferme les yeux et soupire profondément. A mon tour je m'élance à leur rencontre. Je peux entendre le chant des sabres autour de moi, je les évite et pare les attaques avec le deuxième couteau de chasse que j’ai sorti. L’autre couteau virevolte autour de moi et trouve ses objectifs. Un soldat tombe, un deuxième, un troisième... je retire la lame du ventre du quatrième dont le dernier souffle vient de s’éteindre. C'est fini. J'ouvre les yeux. Je les referme. Mon père a fait du bon boulot avec moi.

- Delta un à Delta sept ; répondez !.... Delta un à Delta sept ; répondez ! crachouille un émetteur. Delta un à Delta sept ; vous me recevez-vous ?.... Delta un à Delta sept ; me recevez-vous ?! Répondez !!....

Je m'approche du cadavre du soldat et prends l'émetteur accroché à sa ceinture. Je couvre ma bouche avec ma main et tente tant bien que mal d’imiter la voix d'un homme.

- Delta sept à Delta un ; je vous reçois... trois sur cinq. Nous avons quelques problèmes avec l'émetteur, mais rien de grave. La liaison radio va être coupée. Terminé.
- Voulez-vous qu'on vous envoie des hommes ? Terminé.
- Non, je répète ; tout va bien. Nous allons rentrer à la base vérifier le matériel. Terminé.
- Bien. Bon retour à la base Delta sept. Terminé.
- Merci. Terminé.

Je repose l'émetteur et éteins tous les appareils électriques présents sur les cadavres. Mes yeux contemplent les corps sans pouvoir s'en détacher. Je me relève enfin, mais comme vidée de mes forces, je titube et finis par m’agenouiller à nouveau au sol près des corps. Je me repasse la scène dans la tête. J’ai eu de la chance. Je n’aurai pas dû m’en tirer aussi facilement. Je me passe une main sur le visage et lève les yeux autour de moi. L’alerte semble avoir été levée et les réfugiés sortent peu à peu des abris pour venir contempler la scène.

- Xalyah !

Khenzo m’aide à me relever et me tourne autour pour voir si tout va bien. Je me sens un peu nauséeuse et j’ai une petite estafilade sur le bras.

- J'ai bien cru que t'allais y rester.
- La fillette... ?
- Elle va bien. Sa mère est avec elle.
- Et les autres unités...
- Ne t'en fais pas, si l’alerte est levé c’est qu’elles ne sont plus dans les parages.

Un attroupement se forme autour des cadavres. Les visages des gens sont partagés entre horreur, dégoût et jubilation. Comme si un tel spectacle méritait un tel intérêt.

- Khenzo ?

Je me retourne vers lui.

- Oui ?
- Je peux te demander un service ?
- Bien sûr.
- Aide-moi à les enterrer.
- Pardon ?

Ses yeux s'écarquillent.

- Tu plaisantes j'espère !

Je le regarde en fronçant les sourcils. Non. Je n'ai pas du tout envie de plaisanter.

- Ce sont des hommes ! Tu aurais pu être à leur place... mais tu n'es pas obligé.

Khenzo baisse la tête pour regarder les soldats. Je sais qu'il va m'aider. Je cherche mon manteau des yeux. On est peut-être sous terre mais c'est tout de même l’hiver et il fait de moins en moins chaud. Je l'aperçois sur le dos de la mère de la fillette.

- S’il vous plait ! J'aimerais bien récupérer mes affaires.

La jeune femme sert le vêtement contre elle et hoche la tête. Je suis soufflée.

- Non ?! C’est la meilleure. Rendez-moi ce manteau tout de suite.
- Donnes-lui dix euros et elle te le rendra, me glisse mon compagnon à l’oreille.
- Tu plaisantes Khenzo ?
- Non. C’est comme ça que ça marche ici.
- Attend... tu es en train de me dire qu’ici on paye les voleurs pour qu’ils rendent les objets volés ?!
- Hum... oui, désolé.

Je respire un bon coup et tente de me calmer. Mais non je ne cracherai pas dix euros pour récupérer mes affaires des mains de la mère à qui je viens de sauver la vie de sa fille ! Je prends un air menaçant et foudroie la jeune femme du regard.

- Rendez-moi mes affaires où vous allez regrettez que votre fille ne soit pas restée aux mains des soldats.

Quelques personnes de la foule qui m'ont entendue, s'écartent de moi et regarde la fillette, inquiètes. Il n'en faut pas plus pour que sa mère craque. Elle éclate en sanglots et prestement me rends mon manteau avant de partir en courant.
A présent, il faut enterrer les quatre hommes. Je fais un peu de place autour d'eux et demande si deux personnes veulent m'aider pour leur creuser une tombe avec Khenzo. Le silence s’abat brutalement sur la foule. Personne ne répond. Tout le monde se regarde avec méfiance, comme s’ils allaient se jeter sur le premier qui parlerait.

- Les deux personnes seront payées dix euros chacune ! lance Khenzo.

Là plusieurs mains se lèvent. S'en est trop.

- Non mais je rêve ! Il faut qu'on vous paye pour que vous restituiez les affaires aux gens et il faut qu'on vous paye pour que vous daigner enterrer quatre hommes qui se sont battus pour leurs convictions ! Ce ne sont peut-être pas les vôtres, ni les meilleures, on est d'accord ! Mais ayez un peu de respect dans la vie, ça vous bouffera pas ! Personne ne veut les enterrer ?! Ce n’est pas un problème, je le ferai seule ! Mais vous me dégoûtez et vous ne valez pas mieux que ceux qui vous oppressent…

La foule reste silencieuse. Khenzo s'approche d'un des cadavres.

- Je n'ai pas besoin de ton aide. Vous êtes tous plus pourris les uns que les autres ici.

Sans un regard pour l’homme que je viens d’insulter je vais chercher une corde dans mon sac. En revenant je disperse la foule qui commence à jeter des cailloux aux cadavres. Khenzo, lui, a disparu. J'attache les quatre hommes par les pieds à l'aide de la corde et commence à les tirer derrière moi. Les gens s'écartent sur mon passage. On peut entendre le frottement des cadavres sur le sol ; ça me fait mal au coeur mais je continue ainsi jusqu'à l'entrée de la cité souterraine. Les gardes me regardent bizarrement mais me laissent passer sans rien dire. Et cela vaut mieux pour eux, je suis d’une humeur massacrante.
Dehors la nuit tombe doucement et le froid se glisse sous mes vêtements. Malgré tout il faut que je trouve un endroit où je pourrai enterrer ces quatre hommes. Je trouve un terrain vague à deux cents mètres de là. Avec mon couteau je découpe le grillage qui en barre l’accès et tire les corps un à un au milieu du terrain. Comme je n'ai pas de pelle je me sers de mes couteaux pour commencer à creuser. Quelle ironie du sort, se faire enterrer à l’aide des armes qui ont servi à nous tuer. Avec mes mains je déblaye les trous qui commencent à prendre forme, ce n'est pas particulièrement agréable.
Cela me prend des heures entières, pour les quatre tombes. Ces hommes étaient tous âgés d’une vingtaine d’année. Ils se prénommaient Théo, Mousha, Lens et Fabrice, d’après l’écusson qu’ils portaient à l’épaule droite. Je traine péniblement leur corps dans les trous, prenant soin de disposer leurs effets personnels à coté d’eux. Je ne crois pas en l’au-delà. Je ne pense pas qu’il y ait une autre vie après la mort. Je pense juste qu’on a le droit d’avoir une sépulture décente. J’aimerai croire en un monde meilleur après cette vie, mais c’est se voiler la face que d’y songer sérieusement. Je replie leur bras sur la poitrine et commence à remettre la terre sur eux. C’est toujours aussi pénible à faire. Cela fait partie des choses dont je ne m’habituerai jamais. Une fois la dernière motte de terre remise en place, je ramène quatre petits blocs de granit que j’avais aperçu à l’entrée du terrain vague. Je grave quatre cercles imbriqués les uns dans les autres, afin d'honorer les morts comme il se doit. Même si tout nous opposait, à commencer par la conception que l’on a de la vie, ils ne méritent pas d’être lapidés par une foule haineuse.
Je n'en peux plus. J'ai mal au dos, et je suis lasse de ce monde de cons qui semble avoir perdu toute humanité. Les gens n’ont-ils donc plus de valeurs ?

Et voilà ! Avec beaucoup de retard (désolée ^^) voici enfin une illustration qui représente le détecteur de chaleur qui fait également office de mémo. Il y aurait sans doute des choses à améliorer en terme de design et d'ergonomie, donc on va dire que c'est une première version du "machin".
Quant à la suite du récit, je suis un peu moins satisfaite des dialogues. J'arrangerai ça par la suite pour avoir quelque chose de plus sympa.
Notre petite bagarreuse n'est pas au bout de ses peines...

jeudi 14 octobre 2010

Finalement


Un coeur brisé comme l'humanité qui s'autodétruit. Elle ne pourra échapper au gouffre absurde qui semble l'appeler par delà le temps. Car au final, plus rien n'a d'importance.

Une nouvelle version de Louve. Je suis toujours dans la phase "line", j'en ai déjà quatre sur cinq. Plus qu'une et je pourrai faire des premiers essais de colo !
Oui je sais, c'est un peu light, et je n'ai pas posté depuis un moment. Mais j'ai une bonne excuse (si, si !). Je viens tout juste de commencer un nouveau stage pour faire du game design et du level design en alternance, dans une boite super sympa, et qui fait des (un en l’occurrence) jeux super sympa ! Alors quoi demander de mieux ?! Oui, ça fait un peu je raconte ma vie et tout le blabla, mais voilà, je suis contente alors autant le partager. N'est-ce pas ?
Si ça vous intéresse, vous pouvez aller "zieuter" le site de Brain Candy ici. Il y a quelques artworks qui démontent bien !

samedi 2 octobre 2010

Evasion


Dans un univers aux dimensions oniriques, où l'on ne sait pas si le réel prend le pas sur l'imaginaire, ou si l'imaginaire à pris le dessus sur le réel, Lys tente de s'en sortir avec l'aide improbable d'une luciole. L'a-t-elle créé par magie ou bien est-ce une création de son imagination ? Le doute plane et planera toujours.

La bonne nouvelle c'est que mon projet Evasion a été retenu pour être développé en cours cette année (en plus de huit autres projets tous différents les uns des autres) ! Nous voici maintenant une petite équipe de six personnes, composée de game designers junior et de graphistes junior, pour mener à bien cette tâche. L'autre bonne nouvelle c'est que je fais équipe avec Kalumis et que nous avons décider de créer une plateforme web sous forme de site/blog pour montrer un peu l'évolution du projet. Pour l'instant ce n'est pas encore mis en place, mais cela ne devrait tarder !
Affaire à suivre donc...

jeudi 30 septembre 2010

Lueur d'espoir - Episode 9


C'est en ruminant ces sombres pensées que je m’arrête derrière la petite troupe de Tim. Nous venons d’arriver devant les portes de la cité souterraine : deux grilles d'égout. Une sentinelle armée jusqu'aux dents monte la garde et nous barre le passage, l’œil mauvais et prêt à tirer si nous faisons le moindre geste suspect. Tim leur donne le nom de code de son groupe. L'un des gardes baisse son arme pour aller vérifier l’information sur un ordinateur de poche. Il s’approche ensuite de Tim et lui demande de poser son index sur un appareil tactile. L’emprunte digital est scannée et analysée en quelques minutes. L’homme nous dévisage un à un, vérifiant les portraits des personnes qui accompagnent le chef du groupe. Ses yeux se posent sur moi avec un regard inquisiteur.

- Qui c’est celle-là ? Elle ne fait pas parti de ton unité, déclare-t-il en direction de Tim.
- Non, elle…
- Elle ne restera pas longtemps.

Khenzo s’interpose avant que l’aîné ne décide de n’en faire qu’à sa tête.

- On l’a croisée hier et elle nous a donné un coup de main face au PPNG.

Le garde me dévisage plus longuement sous son casque de marine. Après avoir échangé quelques mots à voix basses avec son compagnon il me fait un signe de la tête. Il me photographie et m’ajoute au tabloïde de l’équipe de Tim.

- Bienvenue à la maison les gars, déclare-t-il enfin sur un ton amical.

Nous passons les deux grilles pour nous enfoncer dans les égouts qui plongent sous terre. Il fait un peu plus chaud qu’en extérieur, mais l’humidité est presque plus désagréable que l’air glacial. Tim marche en tête, nous le suivons tous de près.

- Je dois aller faire mon rapport à Max, lance-t-il. En attendant remettez l’abri en état. Quant à toi Xalyah je veux que tu nous trouves de quoi manger pour ce soir. On dira que c’est un échange de bons procédés.
- Mais je...
- Fais ce que je te dis gamine ! Ici c'est moi qui donne les ordres. On t’héberge, tu nous apportes la bouffe ! C’est ça ou rien. A toi de choisir.

Les échanges de bons procédés ont bon dos aujourd’hui… Qu'est-ce qu'il peut me taper sur les nerfs ce type. Le reste du groupe me dépasse sans me jeter un regard pour s’enfoncer dans les boyaux des égouts. Geremy est le seul à s’arrêter à ma hauteur. Il me fait un grand sourire, attendant visiblement que Tim disparaisse à l’angle.

- Viens, suis-moi ! Pépé est pas très sympa, mais moi oui ! me lance-t-il avec un sourire espiègle. Je vais te montrer où trouver de la bouffe.

Avant que je ne puisse dire un mot, il s’élance à son tour dans les égouts en m'attrapant la main pour m'entraîner derrière lui. Arrivée au coude du tunnel je suis surprise de voir le monde qui circule dans les galeries des égouts. Une foule silencieuse qui se déplace comme si nous nous trouvions dans une fourmilière. Les sons semblent mourir étouffés dans ce labyrinthe de galerie. Le gamin se fraye un chemin à travers les gens qui encombrent le passage, jouant des coudes et n'hésitant pas à marcher sur les pieds. Les égouts ont vraiment été aménagés comme une petite ville. Des renfoncements ont été creusés à intervalle réguliers. Nous passons donc devant des échoppes, des boutiques, et même des cabarets. Ici la vie semble continuer et ignorer le chaos qui règne à la surface. Tout en suivant le gosse dans sa course effrénée, j'enregistre la disposition des lieux. Un groupe armé avec qui je suis restée plus d'un mois, m'a enseigné quelques techniques rapides et efficaces, ainsi que pas mal d’autres choses utiles. Plusieurs fois leurs conseils m'ont sauvé la peau. Je leur dois beaucoup.
En attendant je suis toujours Geremy et je n'ai pas encore trouvé de quoi manger pour ce soir et rassasier tout le monde. Alors que j'allais en faire la remarque au gosse, celui-ci s'arrête brutalement pour me montrer une boutique miteuse du doigt. Un peu plus et je lui rentrai dedans.

- C'est la meilleure épicerie niveau rapport qualité/prix. Bon je te laisse faire ton choix ; j'ai un truc à faire. A tout à l'heure.

Geremy se fond à nouveau dans la foule et me laisse sur place. Je hausse les épaules et traverse la rue souterraine en me glissant entre les passants. Ça sent fort le poivre à l’intérieur. Je me retiens d’éternuer en me pinçant le nez. L’espace n’est pas très grand et les murs sont recouverts d’étagères plus ou moins vides. Il n’y a que de la nourriture. Je prends quelques articles, comme des pâtes, du riz, de la gelée et une pastèque que je déniche derrière une corbeille de fruits avariés. Une fois satisfaite de mes trouvailles je me dirige vers celui qui tient les lieux. Il inspecte mes emplettes en fronçant les sourcils puis sans me regarder il annonce le prix.

- Quarante euros !

C'est cher ! Je suis toujours dépitée par les tarifs pratiqués. Mais il faut bien se faire une raison. C’est partout pareil de toute façon. Je sors deux billets de vingt de mon portefeuille et les tends au petit homme.

- Savez-vous si un groupe d'une centaine de civils est passé par ici ces derniers temps ?

L'homme me dévisage. J'attends une réponse. Il me tend mes achats. J'attends toujours. Je les prends. Pas de réponse.

- Vous avez perdu votre langue ?

Toujours aucune réponse. Je sors de l'épicerie sans trop me poser de question. Il faudra que je demande à Khenzo s'il peut toujours m'avoir des infos par son contact.
Maintenant, je dois m’atteler à la tâche ardue de trouver l’emplacement de l’abri de Tim. Je déambule dans les boyaux souterrains. C’est une sensation étrange de se balader avec un sac de provision dans les égouts, avec par-dessus tout une foule si peu bruyante qu’on a l’impression d’être dans une bulle, étouffant tous les bruits alentour. Chacun semble savoir où aller, certains portants de lourdes malles métalliques, d’autres se déplaçant en petit groupe et parlant à voix basses. Des femmes se promènent simplement avec leurs enfants comme si elles allaient chercher le pain avec leurs bambins. C’est surréaliste. Vraiment. Pourtant les gens n’ont pas l’air d’être inquiets ou de se soucier de leur environnement. Au bout d’un moment je croise Camélia qui sort d'un renfoncement avec un sac en toile à la main. Son visage est un peu pâle et son bras est en écharpe pour ne pas trop solliciter son épaule. Je ne m’en fais pas pour elle. C’est une jeune femme qui à l’air solide, elle s’en remettra assez vite. Quand elle m'aperçoit elle se fend d’un grand sourire et se dirige vers moi. Je lui fais un signe de la tête lorsqu’elle arrive à ma hauteur.

- Je suppose que tu ne sais pas où se trouve nos quartiers.
- Non… pas vraiment…
- Alors suis-moi.

Je marche dans ses pas en silence. Il nous faut un bon quart d’heure avant d’arriver aux quartiers de Tim. Camélia me laisse là. Elle a d’autres plans pour cette nuit que de rester ici. Je la remercie et la regarde disparaitre dans la foule qui commence un peu à diminuer. L’abri est fermé par une porte métallique. J’appuie sur ce que je pense être le bouton d’entrée, c’est un petit rond en pierre incrusté dans la paroi. Il s’enfonce et la porte s’ouvre dans un bruit de pneumatique rouillé. Cela ressemble beaucoup au renfoncement de l’épicerie. C’est composé d’une pièce principale meublée d’une petite armoire métallique, un couloir au fond de la pièce semble desservir plusieurs alcôves avec des couchettes. Une lampe à huile accrochée au plafond éclaire le tout.
Khenzo est au milieu de la pièce principale et essaye d'allumer le réchaud. Je ne vois personne d’autres. Je déballe mes emplettes et commence à préparer le dîner avec la vaisselle que je trouve dans l’armoire qui tient encore debout par je ne sais quel miracle.

- Au fait Khenzo, tu m'avais dit que....

Un signal sonore, strident, m'interrompt soudainement. D'un seul coup une intense agitation semble s’emparer des égouts. J’entends quelques cris qui semblent être des ordres de l’autre coté de la porte. Khenzo éteint rapidement le feu qu’il s’était évertué à allumer, désactive tous les appareils électriques, et appuie sur un bouton rouge que je n'avais pas encore remarqué. Cela déclenche un mécanisme qui fait descendre un mur d’acier devant la porte d’entrée de l’abri nous condamnant à l’intérieur. Une autre porte s'ouvre dans la paroi de droite, à coté du bouton rouge, découvrant une petite cellule.

- Mais qu'est-ce que... ?
- Chut ! Viens ici !

Il me pousse brutalement dans l’abri et je m’écrase contre le mur. Il souffle sur la lampe à huile, nous plongeant ainsi dans le noir avant de me rejoindre dans la cellule. La porte se referme aussi sec. Je n’ai rien compris à ce qu'il vient de se passer, tout est allé trop vite.

- Qu'est-ce qui... ?
- Chut, répète Khenzo dans un murmure. Des unités ennemies sont dans le secteur. Si ces cellules masquent notre présence sur les détecteurs de chaleur elles sont inefficaces pour diminuer le bruit.

J'allume mon détecteur.

- Éteins ça tout de suite ! Ils vont nous repérer, dit-il en me prenant violemment le poignet.
- Je l'ai payé suffisamment cher pour qu'il soit équipé d'un fantôme.

Je me dégage de son étreinte. L'espace est étroit et je le bouscule pour pouvoir aisément manier le détecteur.

- Tu me marches dessus, souffle-t-il.
- Désolée.

Un silence pesant s’est installé. Deux minutes auparavant on pouvait percevoir cette effervescence assourdie qui agitait les égouts, mais à présent un silence de plombs régnait au-dessus de nos têtes. J'ai toujours détesté le silence absolu. Il est souvent annonciateur de malheur. Je regarde mon détecteur. Des points gris s’allument m’indiquant la présence de rongeurs en tout genre dans le secteur. Puis progressivement, des points rouges se mettent à clignoter aux alentours de la cité. Il y en a une trentaine au totale dans un rayon de trois kilomètres. D’après le détecteur il n’y a pas d’armes lourdes. Ce sont des troupes à pieds. Certainement le même genre d’unité que nous avons croisée hier. Au bout d’un moment je percute avec surprise qu’il n’y a en effet aucune présence des civils. Le détecteur ne les voit pas. J’ai beau activer tous les filtres, zoomer et dé-zoomer, pas une seule trace d’eux. Ces cellules sont vraiment efficaces car le petit bijou que je tiens entre les mains est à la pointe de la technologie. Mon attention se reporte à nouveau sur les points rouges. D’après la disposition des lieux que je garde en mémoire quatre d’entre eux sont en train de franchir les grilles d’entrée des égouts. Qu’est-ce qui pourrait attirer des troupes du PPNG dans les égouts ? Je suppose que c’est le PPNG car je ne vois pas qui ça pourrait être d’autre. Vu comment leur gars se sont faits descendre, et comment ils ont renforcé leur patrouille ensuite, ce ne peut être qu’eux. Quelqu’un aurait-il vendu la mèche ?
Pendant que je me concentre sur leur progression et que je réfléchis aux récents événements un autre point apparaît sur le cadran de mon appareil. Je n'y fais pas attention jusqu'à ce que Khenzo me tire la manche pour me le montrer. Il est jaune et il est juste à coté de nous. Ce doit être un civil qui n’a pas eu le temps de se cacher. Ce que je ne comprends c’est pourquoi il reste immobile ? Dans le noir je sens mon compagnon se baisser contre la paroi qui donne coté égout. Je me demande bien ce qu'il fait. Il se relève presque aussitôt, tout agité. A la lueur du détecteur ses yeux noisette ont un étrange regard. Il s'approche de moi et me glisse à l'oreille que ce civil n'est autre qu'une fillette de trois ans.

- J'y vais !

J'allais appuyer sur le bouton qui aurait ouvert la cellule mais l’homme m'attrape une fois de plus violemment le poignet pour m'en empêcher et me retenir.

- Ne fais pas ça, si tu y vas ils te verront, murmure-t-il doucement. C’est du suicide.
- C'est une fillette !
- Je sais et c'est peut-être pour ça qu'elle pourra s'en sortir.

Je regarde le détecteur. A présent les quatre hommes sont à quelques rues d'ici, ils se rapprochent.

- Je ne peux pas... Désolée. Tu n’as aucune idée du sort qu’ils réservent aux plus jeunes d’entre nous.
- Xalyah n'y va pas.

Khenzo me sert le poignet de plus en plus fort.

- Lâche-moi ! Je sais ce que je fais.

A regret il me lâche enfin mais sa main s'attarde sur la mienne. J'appuie sur le bouton. La porte s'ouvre et le mur d’acier se lève. J’appuie sur le bouton rouge, déclenchant le mécanisme de fermeture avant de glisser sous le mur d’acier et la porte métallique qui se referment. La fillette est assise à quelques mètres. Elle tient une poupée en chiffon dans ses mains et regarde autour d’elle apeurée. Je m'agenouille devant elle et l'enveloppe dans mon manteau en prononçant des paroles rassurantes. Je la prends alors dans mes bras et m'éloigne le plus rapidement possible. Avec un peu de chance ils n'ont pas vu notre présence, et si j'arrive à temps pour prendre le coude du boyau...

Voilà la suite ! Pas de détecteur de chaleur détaillé, mais un nouveau dessin de Khenzo. J'avais essayé une version en couleur, mais finalement ce sera du noir et blanc pour rester dans la lignée des autres.

mercredi 29 septembre 2010

Cor et âme


Louve avançait tant bien que mal dans le froid glacial qui s'engouffrait dans le col des Ivis. Elle se plaisait à penser qu'elle marchait dans les pas de terribles guerriers, et qu'autrefois ici s'était déroulée la plus épique bataille de tous les temps qui avait opposé les Lazzivis aux Evenois. Elle se plaisait à penser qu'ici s'était joué l'avenir des deux peuples, et qu'ici s'était scellé une trêve qui avait marqué la fin d'une époque sanglante. Et aujourd'hui elle foulait ce sol avec la même ferveur que ces guerriers sanguinaires. Le cri d'un cor surgi du passé vint chatoyer ses oreilles pour s’immiscer en elle comme un chant d'espoir. Le fruit de son imagination fiévreuse lui faisait entendre ce qu'elle voulait entendre et lui faire voir ce qu'elle voulait voir. Aussi ne fut-elle pas étonnée d'apercevoir des silhouettes fantomatiques rejouer l'histoire sous ses yeux. Cela avait la douceur d'une promesse bientôt respectée et l'aigreur d'un destin implacable, clouant des êtres dans un tableau éternel qui se devaient de revivre sans cesse les mêmes épreuves.


Le chant du cor s'évanouit dans une bourrasque de vent, soulevant le lourd manteau en fourrure de la rejetonne, et emportant au loin les reliques du passé. Vartan était à quelques mètres d'elle, mais le brouillard dissimulait presque entièrement sa silhouette courbée par l'effort. Elle marchait seulement dans les traces du jeune homme, vers un avenir qui n'aurait peut-être jamais de lendemain.

Un petit aperçu d'un univers en cours d'élaboration !

lundi 20 septembre 2010

Libre... ou pas !



Lysiah troque son monde réel pour le monde de Runequest le temps d'une campagne.
Alors la voilà devenu esclave... esclave d'hommes-cochon et réduite a devoir brouter de l'herbe pour être un "bon troupeau"... esclave d'hommes au crâne rasé agitant son fouet dès que les champs ne sont pas bien labourés ou la vigne mal entretenue...
Oui, mais Lysiah a d'autres rêves, d'autres espérances que de rester esclave d'un domaine. Elle rêve d'être une puissante sorcière doublée d'un incroyable talent pour pourfendre ses ennemis à l'épée. Oui, bon, on peut toujours rêver n'est-ce pas ? Alors avec ses compagnons ils doivent montrer leur courage et leur valeur pour mériter cette liberté chérie. Et ça c'est une autre paire de manche.
Entre Bjorn le barbare pas fichu de garder sa langue dans sa poche et qui se fait dérouiller en deux mandales, Clacus le sage qui n'est pas sage et couard par-dessus tout, Mentuis l'archer qui tire fièrement des flèches inexistantes avec un arc inexistant, Crockus qui ne rêve que de capitaliser l'argent de ses compagnons en jouant jusqu'au bout de la nuit, Lysiah la sorcière qui tente sans succès d'achever un scarabée géant sans attendre la fin des débats pour savoir si oui ou non on le garde en vie, et Uzulle le sable qui regarde tout ça avec un œil dépité et désabusé ; ils iront loin. Très loin.
Avec le prêtre de la Lune Bleue du doux nom de Bleu-cauchemar aux fesses et un esprit qui possède l'âme de leur maîtresse Julia, ils sont plutôt mal barrés. A une petite semaine de leur liberté, voilà qu'un esprit de la lune noire tente de posséder également l'un d'eux et de faire couler le sang à Palbar pendant les fêtes.
Voilà encore une belle équipe de bras cassés !


La suite nous dira si la bande de bras cassés mérite sa liberté ! ^^
Notes pour ceux qui n'aurait pas compris un traître mot de ce que je viens d'écrire, il s'agit d'une campagne de jeu de rôle, basée sur l'univers et les règles de Runequest, et commencée il y a quelques mois avec un groupe, ma foi, fort sympathique.

jeudi 16 septembre 2010

Lueur d'espoir - Episode 8

La journée passe lentement, au rythme des quarts de surveillance du groupe. Je propose mon aide pour patrouiller dans le secteur, mais Tim refuse catégoriquement. Il ne me quitte quasiment pas du regard, épiant le moindre geste suspect de ma part. Je décide donc de prendre mon mal en patience et de profiter de ce repos surveillé pour reprendre des forces. J’en ai bien besoin.
Geremy vient me tenir compagnie une partie de l’après-midi. Comme je m’en doutais il va sur ces quinze ans le mois prochain. C’est un gamin bavard, plein de bonne volonté et de bonnes intentions. Il a juste grandit trop vite. Beaucoup trop vite. Et son rapport avec la mort est un peu spécial. Je préfère donc éviter le sujet qu’il essaye d’aborder à plusieurs reprises avec moi. Je ne lui raconterai pas ce que ça fait de tuer huit hommes en quelques secondes. Je ne l’inciterai pas à prendre les armes s’il a le choix de ne pas les prendre. J’aurais aimé avoir le choix, et j’aurais très certainement fait le choix de ne pas les prendre.
Sur les coups de 21 heures, tout le groupe se retrouve autour du baril dont les flammes montent jusqu’à hauteur d’homme. Je reste à l’écart piochant dans mes réserves pour me préparer un frugal repas. Un sachet de fruits secs avec de l’eau. L’ambiance au sein du groupe est détendue. La conversation est conviviale et par moment des éclats de rire s’échappent de quelques gorges. Il ne m’en faut pas plus pour sombrer dans une douce torpeur. Je suis harassée de fatigue, et j’ai le cœur léger rien que de penser à la bonne nuit de sommeil qui m’attend. Je finis par m’allonger contre le mur, me servant de mon sac comme oreiller.

« Je longe silencieusement le couloir, la rapière à la main. Je leur fais signe de s'arrêter. Un silence de mort s'abat sur nos têtes. Je passe la tête à droite. Rien. A gauche. Rien non plus. Je traverse la pièce déserte en évitant soigneusement de marcher sur les débris de verre qui trainent au sol. Ils me suivent, toujours silencieusement. Nous traversons ainsi le bâtiment en ruine sans encombre. Une fois dehors nous longeons les murs toujours sans faire de bruits. Au croisement de la ruelle avec une grande avenue je recommence mon petit manège de reconnaissance. Je passe la tête à droite. Rien. A gauche…. Une brigade du PPNG nous attend, mitraillettes en main. Et manque de chance ils m’ont repérée.

- Fuyez !

C'est la cavalcade. Tout le monde part dans tous les sens, dans le plus grand des chaos. J’entends vaguement quelques ordres de ralliement au point stratégique que nous avions défini un peu plus tôt dans la journée. Suivant le mouvement de foule je range la rapière dans son fourreau. Les soldats arrivent se lancent à notre poursuite ordonnant d’en ramener le plus grand nombre. J’arrive à bout de souffle dans une étroite ruelle et enfonce la première porte que je croise pour rentrer dans l’immeuble. Mais en jetant un œil derrière moi, je m’aperçois que personne ne me suit. Je vois mes compagnons passer en trombe devant la ruelle, rapidement suivi d’une vingtaine de soldat. C'est risqué mais je dois faire diversion pour qu'ils s'en sortent. Je retourne donc sur mes pas et contourne l'ennemi jusqu'à me retrouver entre eux et ceux que je dois protéger coûte que coûte. Dans ma course je dégoupille une grenade et la lance derrière moi. L’explosion est assourdissante et un souffle chaud manque de me jeter au sol. Cela devrait laisser du temps aux autres pour s'échapper de là et rejoindre le point de ralliement. Maintenant je dois attirer le reste des soldats pour qu’ils ne tentent pas de poursuivre les autres. Je lance une deuxième grenade devant moi qui bouche la ruelle de gauche que viennent d’emprunter mes compagnons. Je continue tout droit et bifurque dans la première rue à droite. Je peux entendre les jurons des hommes et leurs bottes claquer sur le sol. Ils sont justes derrière moi, et à priori ils sont tous à ma poursuite, une bonne chose. Ou pas. Je me retourne ; le premier est à dix mètres. Je n'ai plus de forces. Regardant de nouveau devant je tente de m'arrêter mais les bras de cinq hommes se referment sur moi. Ces cons ont réussi à prendre de l’avance pour couper ma trajectoire. C'est la fin. Ils vont me tuer. Et de leur point de vue ce ne serait qu’un échange de bons procédés. La vie d’un des leurs contre la vie d’un des nôtres. Le chef de la brigade s'approche tandis que les autres me maintiennent les bras dans le dos. Il lève son arme. J'aurai au moins eu le mérite d'avoir attiré toute leur attention. Je souris. La crosse s'abat sur ma tête. »

Je me réveille en sursaut, le souffle court. Khenzo est en train de me secouer le bras.

- Aller lève-toi. C’est l’heure de partir.

Je m'assois et passe une main dans mes cheveux. Toujours ce même cauchemar. Je chasse les dernières images qui me restent et prends mes affaires. Je glisse les deux couteaux de chasse dans mes bottes et replace les revolvers dans leurs gaines au niveau de mes cuisses. Après avoir mis mon manteau, je sors mes mitaines des poches pour les enfiler à leur tour. Alors que je m’apprête à remettre dans mon sac les sachets de provisions que j’ai sorti la veille je tombe sur la ceinture de ma rapière. Elle est en cuir finement ouvragée, souple comme du tissus mais aussi solide que de la ferraille.

- C'est quoi ça ? me demande curieusement Geremy par-dessus on épaule.
- Rien... c'est rien.

Je range tout mon bazar et passe mon sac en bandoulière. Ma mitraillette repose le long de ma hanche, à portée de main. Une fois prête, je rejoins les autres qui se sont regroupés devant l’entrepôt. C'est encore l'aube et une fine couche de givre recouvre le sol. Le temps se dégrade de jour en jour et l’hiver commence à pointer le bout de son nez. Je frissonne lorsqu’une bourrasque de vent s’engouffre dans la rue pour nous balayer glacialement. Il est grand temps de troquer un de mes deux shorts contre un pantalon.
Par deux fois dans la journée nous avons fait des détours pour contourner des patrouilles du PPNG. Après la descente de deux de leurs unités dans le secteur ils sont sur le qui-vive. Ils ont renforcé leurs effectifs et ils sillonnent de manière quasi permanente les lieux. Ces derniers temps je les trouve de plus en plus présent à la périphérie de l'Ile-de-France. L'influence d'Augustin Macrélois a certainement dû s'étendre un peu plus pour recruter de nouvelles troupes. Ce gars est un vrai parasite. Six mois après la nuit de la Folie il s'était autoproclamé président de France. Bien entendu, vu le fiasco qui règne dans le pays, cette appellation n'a plus aucun sens. On est président quand on a une nation à gérer. Aujourd’hui à quoi ressemble la France ? Un champ de ruine. Seule la capitale et quelques villes ont été épargné. Trop peu pour avoir quoique ce soir à gérer. Je sais que Paris est devenu le QG de Macrélois. Et si être président de la France aujourd’hui n’a plus de sens, en revanche ce qui en a un, c'est qu'il est un militant fanatique du PPNG. Il reçoit donc l'appui inconditionnel du fondateur du parti : Ken-Lee-Wu Wonghonk. Ce vieillard, aux ambitions dévastatrices et démesurées, accorde tout le soutient militaire et financier dont Macrélois a besoin. A se demander si le véritable maître du jeu en France n’est pas Wonghonk qui s’amuse ainsi à placer ces marionnettes sur l’échiquier du monde.
Je rêve du jour où toutes les crapules de leur genre seront éradiqués du pouvoir et expédiés rapidement là où personne n’aimerait les rejoindre. Le monde s'était cru à l'abri de ce genre de choses ; il s'est endormi sur ces acquis et voilà le résultat... voilà ce qui arrive quand on ne fait que regarder le passé ; on oublie que le futur est là devant nous, et que chaque jour il prend un nouveau visage. Aujourd’hui nous payons le prix de toutes nos absurdités. Il faut espérer qu'il n'est pas trop tard pour changer la donne, mais ce sera dur... et long.


Hop hop hop ! La suite d'Horizon, avec en prime un petit work in progress de Khenzo. Oui Lysiah se met à dessiner autre chose que des femmes... comme quoi tout arrive !

mardi 14 septembre 2010

Ophéa... et la lumière fut !

Son plus lointain souvenir remonte au jour où son âme s'ouvrit au monde. Ses yeux se posèrent alors sur un regard étrange. Un regard où l'angoisse et l'insouciance se côtoient comme deux vieilles amies. Un regard où l'espoir brille à nouveau de mille feux, comme une renaissance au cœur des ténèbres.
Lys est seule. Lys est perdue. Lys a peur.
Son seul espoir repose désormais sur Ophéa, sur son dernier grain de folie.
Une étrange lutte commence alors pour un unique objectif. Que la lumière soit...


Aussi surprenant que cela puisse paraitre, ça arrive à Lysiah de bosser pour de vrai. Si, si, je vous jure ! La rentrée approche vite, avec son lot de galères, d'émotions, de nouveautés, et surtout de projets, tout plein de projets !
Voici donc un tout petit aperçu d'un concept de jeu qui repose sur un univers onirique et poétique. Mais j'en ai déjà trop dit pour l'instant, laissons le mystère planer quelques temps...

vendredi 10 septembre 2010

Un vide passe


Le coeur vidé comme une absence qui ne se comblera jamais.
Elle regardait au loin, et ses espoirs, un à un, disparaissaient à mesure que ses certitudes étaient ébranlées.

mardi 7 septembre 2010

Lueur d'espoir - Episode 7

Je me passe les mains dans les cheveux. Ils sont encore humides le long de ma nuque. La fatigue de ces derniers jours me rattrape. Aujourd’hui je suis lasse de cette vie. Je soupire et jette un œil en direction de Camélia. La jeune femme s’est redressée sur la paillasse. Elle me regarde curieusement.

- Comment tu t’appelles ? demande-t-elle doucement pour ne pas être entendue de Tim.
- Xalyah… Comment te sens-tu ?
- Bien… enfin mieux ! Merci.
- Je t’en pris. J’ose espérer que tu en aurais fait autant à ma place.

Elle lève un sourcil perplexe. Je ne sais pas comment je dois prendre cette réaction. Khenzo qui était allé chercher quelque chose de l’autre coté du hangar revient vers nous et s’agenouille devant.

- Tu veux un peu de café ?
- Je veux bien.

Il me tend une timbale en fer remplie d’un liquide noir bouillant. Après m’avoir servi il fait le tour de ses compagnons. Il finit par Tim qui boude toujours dans son coin puis vient s'asseoir à coté de moi.

- J’espère que tu ne lui en tiendras pas trop rigueur. Il a été un peu brutal, mais je crois que la blessure de Camélia l'a plus secoué qu’il ne voudra l’avouer.
- Il n'y a pas de mal...

Le silence retombe entre nous. Deux personnes se lèvent près du feu et sortent du hangar par une porte dérobée sur le coté. Je suppose qu’ils vont entamer leur quart pour surveiller la zone. Le calme apparent et le crépitement des flammes contre les parois rouillées du baril me rappellent des temps meilleurs. Je ferme les yeux quelques instants. Khenzo ne semble pas vouloir bouger à coté de moi.

- J’aurais une question…
- Oui ?
- Que faites-vous ici ?

Je tourne la tête pour le regarder. Même si je lui donne tout juste la vingtaine, il a les traits d’un homme mature qui a vécu beaucoup de chose et qui pèse ses mos et ses actes. Je le sens un peu sur ses gardes suite à ma question. Il souffle sur les mèches qui lui balayent le front.

- Nous « campons », si je puis dire, pour aujourd’hui.
- Non, je veux dire ; que faites-vous dans cette ville tous les quinze ? Répond-moi franchement.
- Et bien...

Il jette un coup d'œil à Tim. Je sens qu’il hésite à me répondre.

- Ça ne va pas lui plaire mais tant pis. En fait nous sommes ici en patrouille. Nous... il y a une petite cité souterraine dans le coin et nous veillons à sa sécurité.
- Une cité souterraine ? Ici ?

La flamme de l’espoir se ravive au fond de moi. Peut-être…

- Oui, les survivants de la ville ont trouvé refuge dans les égouts il y a près d’un an maintenant, continue Khenzo qui ne s’est pas aperçu de mon trouble. Ils les ont aménagés pour pouvoir y vivre. C’est plus confortable que certains endroits où je suis passé.
- Comment ont-ils fait pour échapper aux patrouilles du PPNG ? Nous sommes presque en territoire conquis par Macrélois ici.
- Disons qu’ils ont trouvé un système de protection qui s’est avéré efficace jusqu’à présent.

Mais je ne me fais pas d’illusions. Tôt ou tard ils devront soit se soumettre, soit partir.
C’est tellement fataliste comme raisonnement. Mais tellement vrai également. En territoire conquis il n’y a pas trente six solutions. Khenzo vient d’en citer deux d’entre elles. La troisième et dernière consiste à mourir. Tellement fataliste…

- Et toi d’où viens-tu alors ?
- Moi ? Khenzo me regarde avec un sourire que je ne sais interpréter. Après la chute de Paris et la nuit de la Folie, je me suis retrouvé seul. J’ai pas mal erré dans la région, et il y a presque neuf mois, j'ai rencontré Tim et son groupe. Depuis on voyage ensemble. Après avoir parcouru pas mal de villes nous avons atterrit ici. Cela fait deux mois que nous assurons la sécurité de la cité. En échange on a un endroit où dormir quand on ne patrouille pas. Mais je pense que nous allons partir d'ici peu… Je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça, rajoute-t-il après un long silence.

J'assimile ce qu'il vient de me dire tout en le dévisageant. Il est plutôt grand, un mètre quatre-vingt-dix je dirais, brun, les cheveux en bataille, de grands yeux noisette, et une barbe de deux jours sur les joues. Ses traits sont tirés et à mon avis cela doit faire longtemps qu'il n'a pas dormi une nuit entière. Les temps sont vraiment durs.

- Tu as perdu ta famille pendant la nuit de la Folie ?
- Non… Je ne l'ai jamais connue. J'ai été élevé à la DASS. En un sens je n'ai rien perdu et tout gagné dans cette guerre. Elle m'a donné la chance d'avoir une figure paternel à mes cotés.
- Tu parles de Tim ?
- Oui. Il est rustre et parfois grossier, mais c’est quelqu’un de bien. A vrai dire je lui dois encore beaucoup.

J’observe les compagnons de mon interlocuteur. Même s’ils sont en apparence détendus je les sens méfiants à mon égard et je les comprends ; ils n’ont aucune garantie sur mes intentions si ce n’est ma parole et celle de Khenzo qui a décidé de me croire. Je dois dire que c’est peu. Je ne peux pas en vouloir à Tim de ne pas pouvoir m’encadrer. Je ne peux pas leur en vouloir de se méfier plus que nécessaire. La prudence n’est jamais de trop.
L’homme assis à mes cotés est retourné dans son mutisme. Il fixe le sol entre ses pieds perdu dans ses pensées. Il dégage une aura agréable. Il n’est pas comme tous ces hommes que j’ai croisés. Arrogants, fiers, méprisants. Non. C’est plutôt une force calme qui se tient à quelques centimètres de moi.
Camélia s’est assoupi, tenant le bras de son épaule blessée serré contre elle. Comme tous les autres elle porte des vêtements usés ou déchirés. La seule chose qui les distingue un peu des civils que j’ai pu croiser jusqu’à maintenant ce sont de petites épaulettes en cuir et en fer maintenus par des sangles qu’ils portent tous. Malheureusement pour la jeune femme, la balle a trouvé une trajectoire évitant l’épaulette pour aller se loger à coté du passage de la sangle. Ils sont également tous armés jusqu’aux dents. Même si aujourd’hui tout le monde porte au moins une arme à sa ceinture, eux sont mieux armés que la plupart de la population survivante. Je comprends mieux pourquoi maintenant.
Le plus jeune du groupe se lève et vient s’asseoir quelques mètres plus loin en face de moi. Khenzo m'apprend qu'il s'appelle Geremy. Il doit avoir une quinzaine d’année à tout casser. Il a tout de l’ado en pleine croissance.

- Alors comme ça tu as sauvé Khenzo en tuant huit soldats du PPNG ?

Je jette un regard interrogateur à mon voisin. Il me fait un sourire contrit en guise de toute réponse.

- Oui. Pourquoi ?
- Il parait que tu les as descendu en moins d'une minute... ce devait être grandiose, ajoute-t-il en mimant théâtralement les tirs avec sa main.

Je suis choquée qu'un gamin de son âge parle ainsi de la mort de plusieurs hommes, même si c'étaient ses ennemis.

- C'est exact. Mais sois plus respectueux envers les morts. Cela n'a rien d’extraordinaire de tuer ou d'être tué.

Geremy fait la moue et se passe une main dans ses cheveux blonds comme les blés pour les ébouriffer.

- As-tu déjà pointé une arme sur quelqu'un ?
- Heu... non.
- Alors débrouille-toi pour le faire le plus tard possible.
- Et tu devrais l’écouter ! ajoute Khenzo d’un ton sévère.

Le gamin croise les bras sur sa poitrine et fait mine de bouder. Décidément je vais finir par croire que c’est la mode dans ce groupe ce genre d’attitude.

- Et toi que fais-tu ici ?

Je jette un œil à mon voisin.

- Je poursuis ma route.

Ma réponse évasive ne lui suffit pas.

- Où mène-t-elle ta route ?

Je soupire. C’est un sujet que je n’ai pas forcément envie d’aborder. Pourtant je vais le faire. Je dois bien ça à l’homme qui a donné sa bénédiction pour que je reste ici. Question de principes… Oui ça existe encore les principes. Du moins pour moi.

- Nantes.
- Nantes ?
- Oui, je suis la trace de quelques personnes. Et d’après ce que j’en sais aux dernières nouvelles elles se dirigent vers Nantes. D'ailleurs vous n'auriez pas croisé, il y a quelques jours, un groupe de civils qui cherchaient à fuir la région parisienne ?
- Des civils qui fuient la région on en a croisé un paquet. Tu cherches qui exactement ?
- Ma famille…

Je me mets à rêvasser. Le sourire de ma mère, la bienveillance de mon père, l'insouciance de mon petit frère, hantent mes pensées. Ils me manquent tellement. Les choses n’auraient pas dû se passer comme ça. D’ailleurs rien n’auraient dû se passer comme ça, à compter de la nuit de la Folie. Khenzo me parle mais je ne l'écoute pas.

- Tu disais ?
- Quelqu'un pourra sûrement t'aider. D’après ce que je sais il est au courant de tous les mouvements qui ont lieu dans ce secteur. Donc si ta famille est passée par là il sera au courant.
- Où puis-je trouver cette personne ?
- Comme ça ? Aucune idée. Je ne l’ai jamais vu. Mais je connais quelqu’un qui pourrait te mettre en contact avec lui si tu veux.
- Pourquoi ferais-tu ça pour moi ?

Je me méfie. J'ai déjà eu à faire à ce type de situation. Ils sont gentils, prévenants, t'offrent leur amitié, et une fois que tu leur tournes le dos, ils te poignardent. J’espère me tromper pour une fois, mais on n’est jamais trop prudent.

- Je te dois sûrement la vie, et tu nous as aidés à prendre soin de Camélia. Cela fait deux bonnes raisons de te donner un coup de main, tu ne crois pas ?

Un point pour lui, je ne trouve rien à répondre. Et après tout, si je peux obtenir quelques informations, je n'ai rien à perdre et tout à gagner.

Enfin la suite des aventures de notre très chère Xalyah ! En prime voici un petit speedouille fait à l'arrache il y a quelques temps qui présente la bouille générale des soldats basiques de l'armée du Parti Politique de la Nouvelle Génération.
Suite au formatage raté de mon disque dur je vais devoir reprendre à zéro les boulots sur lesquels j'étais en train de bosser, du coup pour les illustrations je fais un peu du recyclé, j'espère que vous ne m'en voudrez pas !