vendredi 22 février 2013

Lueur d'espoir - Episode 15



Je me réveille en sursaut, le cœur battant à tout rompre. Un goût de sang me monte à la bouche tandis que je porte une main à mon ventre pour vérifier l’état de ma fine cicatrice. 

- Ça va Xalyah ? 

Nedj ! Je ne l’avais même pas remarqué alors qu’il était quasiment en face de moi. Prestement je retire ma main de sous mon tee-shirt et me lève en m’ébouriffant les cheveux. 

- Oui, oui, ça va. Merci. 

Le cadran de mon mémo indique six heures du matin. Il est temps de rassembler mes affaires. Quinze minutes plus tard, Khenzo, Jeremy, Tidji, Camélia, Nedj, Ed, et… Tim sont devant l’abris, leur sac à la main et prêts à partir. Les adieux sont brefs, mais derrière ces gestes froids je perçois l’émotion de chacun. Cela faisait plusieurs mois qu’ils vivaient ensemble et se protégeaient mutuellement, donc forcément ça créé des liens. Tim ne peut s’empêcher de faire remarquer avec rudesse qu’il part uniquement pour suivre Khenzo, et non pour m’aider ou me suivre. Le concerné lève un sourcil désapprobateur, mettant fin à la tirade ridicule de l’aîné. Je hausse les épaules ; qu’est-ce que ça peut bien me faire ? Après tout chacun vit sa vie, et je ne lui ai rien demandé. 

La nuit a été très froide. Un paysage désolé et recouvert par cinq centimètres de poudreuse nous attend tranquillement tandis que les premiers rayons du soleil perce difficilement l’épais ciel gris qui recouvre la ville. L’hiver est enfin arrivé et il promet d’être particulièrement rude. 


Chacun s’emmitoufle dans ses vêtements les plus épais et dans le silence le plus total nous entamons notre première journée de marche. Alors que nous quittons progressivement la région parisienne, la vie semble de nouveau animer les rues des villes et villages que nous traversons. Paris et ses environs sont totalement sous le contrôle de Macrélois depuis presque douze mois. Seuls les partisans du PPNG circulent librement derrière les murs de la petite couronne. Les autres sont soit morts, soit détenus sous haute sécurité à l’abri des regards de la foule. Cela ferait désordre d’exposer en plein jour les multiples tortures et expériences qu’ils pratiquent sur leurs opposants. 

Il est courant de voir des patrouilles de PPNG jusqu’à cinquante kilomètres autour des chantiers du mur de la grande couronne, mais au-delà leurs excursions se limitent pour l’instant au strict nécessaire pour assurer leurs différentes missions. Alors certains habitants de la région s’essayent à reconstruire leur environnement, dans l’espoir qu’un jour, les choses reviendront peut-être à la normale. J’ai entendu parler de grandes exploitations remises en état depuis peu au sud de la Seine et Marne, et au nord du Val d’Oise. Quelques milices protègent ces secteurs clés et sécurisent les convois de marchandises pour alimenter le marché noir. Le groupe avec lequel je suis restée pendant quelques mois était l’une d’elle. Nous étions chargés de protéger une ferme et ses élevages et d’assurer la liaison avec les lignes des convois de marchandises. C’était une période assez étrange quand j’y repense. 

En fin d’après-midi, Nedj qui n’a cessé de bidouiller ses appareils depuis notre départ, nous annonce fièrement qu’il a sans doute trouvé de quoi nous déplacer plus vite. Sans nous donner la moindre explication sur la façon dont il s’y est pris, il nous informe que le rendez-vous a été fixé le lendemain à 15 heures dans une ville qui se trouve à soixante-dix kilomètres d’ici. 

- J’ai pas eu le choix, dit-il en levant les bras en l’air devant notre regard noir. 

Tim décide alors d’accélérer un peu la cadence car à ce rythme il est clair que nous n’y serons jamais. 

A la tombée de la nuit nous avons parcouru la moitié du chemin. Autant dire que je ne sens plus mes jambes. Le reste du groupe n’est pas en meilleure forme que moi non plus. Chacun s’étire et grogne dans son coin, maudissant Nedj de ne pas avoir su mieux négocier le lieu de rendez-vous. 

Ed finit par trouver un endroit à l’abri du vent et du froid pour dormir cette nuit. C’est avec soulagement que nous nous laissons glisser contre le mur ce cet ancien garage pour étendre nos jambes douloureuses. Camélia déniche un petit réchaud dans une armoire de l’arrière-boutique et fait chauffer un peu d’eau pour diluer un sachet qui lui donnera un goût de poulet et de pomme de terre. En cœur nos estomac gargouillent de faim en pensant au repas chaud qui nous attend : de l’eau chaude aromatisée ! On a rêvé plus consistant, mais faute de mieux ce sera suffisant. 

Après avoir mangé en silence, les garçons se regroupent autour de Jeremy qui sort un paquet de carte. Pour l’instant je n’ai pas envie de me mêler à eux. Toutes mes pensées sont tournées vers les miens en espérant qu’ils vont bien. 

Camélia et Tidji prennent le premier tour de garde à l’étage pour avoir une bonne vue sur la rue. Le silence règne à présent en maitre sur les environs ce qui me rend un peu morose. 

Le lendemain, nous partons à l’aube dans le silence le plus complet. Nous traversons plusieurs villages, et à chaque fois les habitants des lieux ferment les restants de portes et de volets sur notre passage. C’est vrai que nous sommes armés jusqu’aux dents, et je suppose qu’étant donné le climat actuel cela doit renforcer le sentiment d’insécurité de ces pauvres gens. C’est donc d’une humeur massacrante que nous atteignons le point de rendez-vous avec une heure et demie d’avance. Pour patienter, Jeremy sort à nouveau son jeu de tarot. Tidji, Nedj, Ed et Camélia s’empressent de le rejoindre. Certains pour prendre leur revanche, d’autres pour passer l’ennui. 

Je n’ai jamais été doué à ce jeu, et pourtant mon grand-père déployait beaucoup d’énergie pour que j’en comprenne toutes les subtilités, et ce, depuis mes six ans. Mais non, il n’y avait rien à faire. Les jeux de cartes ne m’ont jamais vraiment intéressée. La seule chose que j’aimais vraiment, c’était d’observer les joueurs de poker. Ce jeu basé entièrement sur le bluff m’intriguait beaucoup à l’époque. Au casino que possédait mon grand-père, il y avait un club de joueur de poker et j’y allais très souvent pour les regarder pendant des heures. Au bout de trois années d’observation j’étais capable de savoir qui mentait et qui disait la vérité. Aucune expression des visages des joueurs, qu’ils soient décontractés ou tendus ne m’échappaient. 

A l’âge de mes douze ans mon grand-père me fit appeler dans son petit bureau, tout en haut du casino. C’était une petite pièce avec de grandes baies vitrées, qui laissaient entrer la lumière à flot. Papi possédait un vieux bureau en bois d’époque, et un vieux sous-main en cuir vert l’ornait depuis toujours. Des photos de famille et du club de poker tapissaient les murs lambrissés. Alors que je m’installais dans le fauteuil confortable qui faisait face à son bureau, il m’apprit qu’il voulait que je l’aide à choisir les meilleurs joueurs de son club. Un grand tournoi international allait avoir lieu à Las Vegas dans quelques mois, et il avait l’objectif de décrocher le prix décerné pour cette occasion. « Une merveilleuse occasion de faire connaître notre casino », répétait-il tout au long de cette conversation. Bien entendu, j’étais fière que mon grand-père me confie cette tâche, et c’est avec ardeur que tous les soirs je passais au club pour l’aider à faire son choix. 

Six mois plus tard, Papi et son équipe embarquaient à bord du Queen Mary IV. Il m’appela cinq fois de Las Vegas pour me tenir au courant de l’avancée des joueurs que j’avais sélectionnés avec lui pour le tournoi. Après ce cinquième appel, je n’eus plus jamais aucunes nouvelles de lui. Il s’était tout simplement envolé. Aucun signe d’effraction dans sa chambre d’hôtel n’avait été relevé. Aucune trace de lutte. Ses affaires étaient soigneusement rangées et son plateau repas l’attendait dans le couloir. Mais pas de trace de Papi. Même si ses joueurs affirmaient être bien venus avec lui et l’avoir vu plusieurs fois, il n’apparaissait sur une vidéo de surveillance, le registre ne contenait pas son nom, aucune empreinte digitale ne fut retrouvée dans sa chambre, ni aucun ADN. Rien. Nada. Comme s’il n’avait jamais mis les pieds à Las Vegas. Sauf que la présence de ses affaires rangées et de sa valise sous le lit prouvait le contraire. Une enquête avait été ouverte par le FBI et un avis de recherche avait été lancé. Ma mère et mon père avaient fait plusieurs fois le voyage jusque là-bas, mais au bout d’un an, alors que rien n’avait évolué, les recherches cessèrent et l’affaire fut classée sans suite. Je ne sais même pas s’il était encore vivant au moment de la Rupture. Et si c’était le cas, a-t-il survécu ? 

Suite à sa disparition, ma mère reprit l’affaire de Papi, mais rapidement cela devint trop difficile pour elle, et elle finit par revendre le casino où son père avait passé toute sa vie. Peu de temps après les bombes explosèrent. Je ne crois pas qu’il reste grand-chose de cette vieille bâtisse de brique. Je n’ai pas eu l’occasion d’y retourné et je ne sais pas si j’en aurais le courage aujourd’hui encore. Parfois je me dis qu’il vaut mieux que je garde en mémoire les bons souvenirs liés à cet endroit.

J'ai décidé de poursuivre le récit comme ça car finalement il n'y a pas de changement fondamental. Quelques éléments historiques et quelques descriptions supplémentaires ainsi qu'un remaniement des dialogues. Cela devrait rester compréhensible, et après tout ce blog est un bac à sable, alors les pâtés ne sont pas forcément tous parfait.

J'ai encore du boulot pour savoir dessiner les mecs mais bon, je suis assez contente de ce premier essai (en même temps avec des réfs c'est plus facile vous me direz). Voici les différentes étapes qui m'on amené au résultat final :

1. Crayonné fait plus ou moins à l'arrache à partir de plusieurs photos de Falling Skies comme je le disais dans mon post précédent.



2. Line refaite sur toshop.


3. Correction de quelques erreurs d'anatomie (il en reste sûrement encore mais j'ai dû corriger le plus gros).


4. Rajout du fond et des textes.
Les derniers détails sont rajoutés ensuite pour la version finale que vous avez en haut du post.


[Edit : c'est mon 100ème post ici ! \o/]

mercredi 13 février 2013

Horizons - Être ou ne pas être... question existentielle et autres bêtises


Vu que j'ai "terminé" (c'est un bien grand mot) la première version de Destins croisés sur word et bien que je sois loin d'avoir tout mis ici (environ 24 pages sur les 125 déjà rédigées), je me disperse un peu à droite à gauche, remplissant mes carnets de nouveaux templiers (que je rajouterai ici à l'occasion), de fleurs, d'oiseaux (hé ouais faut me croire !), de bébés (ben il en faut pour tous les goûts...) et... et de la team d'Horizons que vous pouvez voir ci-dessus !

Pour ceux qui n'auraient pas reconnus c'est directement repris d'une photo de promotion de la série Falling Skies que j'ai découverte il y a peu. Dans Horizons il n'y a pas d'aliens, de rampants ou autres bizarreries, mais j'ai bien aimé l'ambiance, m'évoquant un peu celle de mon univers. La série n'est pas parfaite, mais elle a le mérite d'être bien réalisée pour son genre.

Bref tout ça m'a donné envie de me replonger un peu dans Horizons et de refaire quelques dessins à ce sujet. Sauf que... (bah oui sinon ce serait trop beau hein !), et bien en voulant faire ce post je me suis rendue compte que j'avais tellement retouché le texte depuis le dernier épisode mis en ligne que mettre la suite comme ça n'aurait pas eu beaucoup de sens. Si la syntaxe, les fautes, et les tournures de phrases ont été corrigé, j'ai aussi modifié des passages histoire de rendre l'univers et les personnages plus vivants (enfin en tout cas c'était le but à la base !).

Du coup, ça m'a donné envie de faire un petit parallèle entre deux passages (et puis de raconter un peu ma vie aussi sinon c'est pas drôle) pour voir si j'ai réellement évolué ou si j'ai juste envie de m'auto-envoyer des fleurs. Donc je ressors la v1 de l'histoire qui date de novembre 2011 et la v2 qui date de... bah maintenant en fait, pour les passages les plus récents. Et rassurez-vous la véritable v1 (qu'on appellera intimement la v0 date en réalité de 2004... un vieux carnet... les années passent hein).

Ce passage est inédit et se situe quelques jours après l'épisode 14.


Donc version datant de 2011 :


Je rêvasse ainsi, jusqu’à ce qu’une grosse moto volante et une énorme Jeep arrivent à pleine vitesse sur la place. Les deux engins se garent près de la fontaine délabrée. L’homme de la moto descend, il est d’une stature imposante, sa tête est recouverte d’un béret, son visage balafré inspire la peur, et sa mâchoire carrée semble de fer. Ses bras nus jouent les mécaniques et les reflets chocolat de sa peau luisent à la pâle lueur du jour. Un bataillon de chaînes en or et en argent orne son torse musclé. Son pantalon de cuir craque au moindre de ses mouvements et ses grosses chaussures noires couinent à chaque pas. Il armé d’une mitraillette à baïonnette et d’un sourire à faire pâlir un mort. 

La porte de la Jeep s’ouvre et un deuxième homme en descend. Plus fin de carrure que son acolyte, il est chauve avec un grand tatouage d’aigle sur le front. Il porte un lourd manteau noir en cuir qui le couvre jusqu’à mi-mollet. Des lunettes de soleil masque son regard, et son menton pointu darde dans notre direction. Ses bottes métalliques claquent sur le sol et résonnent dans l’air, jusqu’à ce qu’il s’arrête à la hauteur de Tidji.

- Alors cousin. Quoi de neuf ? sa voix grave s’élève dans l’air glacial. 
- C’est celle-là ? demande Tidji en pointant du doigt la Jeep. 
- Ouais mon frère. Elle est à toi… et aux autres, déclare-t-il en nous regardant par-dessus ses lunettes noires. Son regard est aussi froid que l’air. 

Il fait le tour du petit groupe que nous formons, s’attarde devant Camélia pour la reluquer, puis s’arrête à nouveau devant Geremy. 

- T’as quel âge gamin ? 
- Quatorze. 

Réponse brève accompagnée d’un grand sourire. 

- Depuis quand t’engages des mioches Tidji ? 
- Laisse-le tranquille Neil. C’est lui qui a voulu venir. Et puis je n’ai engagé personne. Je ne suis pas responsable de lui. 
- Qui alors ? Tu sais pourtant bien que je ne traite qu’avec les responsables, et non avec les sous-hommes. 

Tidji hésite, c’est vrai que nous n’avons pas pensé à cet aspect-là. 

- Ce… c’est Xalyah, lâche-t-il au bout d’un moment. 
- Qui ça ? 
- Xalyah. C’est moi. 

Je fais un pas en avant. Neil me regarde des pieds à la tête et s’avance vers moi.

- Alors mignonne, qu’as-tu à me proposer pour ce petit bolide ? 
- Deux milles. 
- Deux milles ? Te fous pas de ma gueule, tu sais que ça veut beaucoup plus, d’autant plus que c’est le dernier modèle. 
- Et ? je joue la fille ignare qui ni connaît rien. Il faut bien tenter sa chance. Je lui souris à pleine dent. 
- Et… deux milles euros c’est ridicule comme prix. Cette Jeep en vaudrait au moins trente milles en temps normal. Au regard de la conjoncture actuelle, je veux bien baisser de moitié le prix, mais deux milles euros c’est dérisoire. 
- Deux mille cinq cents alors ? je minaude un peu comme si j’étais la dernière des cruches. 
- Tidji, d’où elle sort cette femme ? demande Neil d’un air perplexe. 

Tidji hausse les épaules, mais une fois que l’homme se retourne à nouveau vers moi, il lève un pouce en direction du ciel et me fait un clin d’œil. 

- Non, je ne peux pas te la laisser à ce prix-là. 
- Trois milles alors ? C’est tout ce qu’on a, dis-je l’air contrite. 
- Bien sûr. Vous êtes huit, et vous n’avez que trois milles euros sur vous. Je ne te crois pas un instant. 
- La vie n’est pas facile ces derniers temps. C’est à prendre où à laisser. 

Neil fronce le nez, et derrière ces lunettes noires je l’imagine fixant le ciel gris pour réfléchir. Je ne pense pas qu’il réussisse à vendre sa Jeep à quinze milles euros. Personne n’aurait une telle somme à dépenser pour ça. Peut-être que trois milles euros c’est dérisoire, il n’empêche qu’il ne trouvera pas forcément mieux ailleurs. Et est-ce que cela vaut vraiment le coup de traverser la France pour aller la vendre sachant que le coup du voyage serait élevé. Tout dans son attitude me fait penser qu’il va accepter. Ses épaules se voûtent un peu, et ses doigts jouent avec un bouton de son manteau. 

- Quatre milles ? demande-t-il dans un dernier espoir. 
- Trois milles et pas un centimes de plus. 
- Bien… bien… marché conclu, soupire-t-il. Je ne prends que du cash. 

Je sors six billets de cinq cents euros de mon portefeuille. Il doit me rester pas plus de mille euros. Les temps sont durs, et à ce rythme-là je vais avoir de sérieux problèmes. Peut-être qu’il faudra que je m’engage à nouveau dans quelques milices armées pour que je puisse me remplir un peu le porte-monnaie. 

- Bon mon frère, prend soin de toi, et puis à l’occasion, si tu passes dans le coin, viens me voir. 
- Oui, si je passe par là, je ne t’oublierais pas. 
- A plus la compagnie ! s’écrie Neil en repartant d’un pied ferme vers la moto. 
- Neil… déclare Tidji sur un ton de reproche. 
- Quoi ? 
- Tu n’oublies pas quelque chose ? 
- Si j’oublie… Ha oui ! Excuse-moi vieux ! 

L’homme chauve fouille dans ses poches puis envoie en l’air les clefs de la voiture. Tidji les attrape en vol et fait un signe de tête à Neil. 

L’autre homme armé d’une mitraillette n’avait pas bougé de tout l’entretient. Alors que Neil arrive à sa hauteur, il enfourche la moto et fait vrombir le moteur. Neil s’assoit derrière lui, et les deux hommes s’envolent à quelques mètres du sol. Après un dernier signe de la main, les deux hommes filent à toute vitesse, et bientôt le bruit du moteur se perd dans l’air.



Et voici la nouvelle version de 2013 :


Le bruit d’une grosse moto me sort de ma rêvasserie. Une énorme Crossover de couleur noir mat la suit de près sans un bruit. Les deux engins déboulent ainsi à toute vitesse sur la place pour s’arrêter en un dérapage spectaculaire et poussiéreux. L’homme perché sur la moto descend lentement. Il est très imposant, d’une stature digne des meilleurs marines des USA, sa tête est recouverte d’un béret vert couché à droite avec une insigne étincelante à gauche, son visage balafré lui donne un air sinistre et sa mâchoire carrée semble de fer. Ses bras nus tatoués roulent des mécaniques et les reflets chocolat de sa peau luisent à la pâle lueur du jour. L’archétype même du commando marine de l’armée française et fier de l’être. Un bataillon de chaînes en argent orné de plaque miliaire se balance sur son torse musclé. Son pantalon de toile verte se tend au moindre de ses mouvements et ses grosses rangers noires couinent à chaque pas. Il armé d’une mitraillette à baïonnette d’un autre âge et d’un sourire à faire pâlir un mort. 

La porte côté conducteur du Crossover s’ouvre et un deuxième homme fait son apparition. Plus fin de carrure que son acolyte, il est chauve avec un grand tatouage d’aigle sur le front. Il porte un lourd manteau noir en cuir qui le couvre jusqu’à mi mollet. Des lunettes de soleil masquent son regard, et son menton pointu darde dans notre direction. Ses bottes métalliques claquent sur le sol et résonnent dans l’air, jusqu’à ce qu’il s’arrête à la hauteur de Tidji. 

- Alors cousin. Quoi de neuf ? sa voix grave s’élève dans l’air glacial. 
- C’est celle-là ? demande Tidji en pointant du doigt la voiture. 
- Ouais mon frère. Elle est à toi… et aux autres, déclare-t-il en nous regardant par-dessus ses lunettes noires. Son regard est aussi froid que l’air. 

Il fait le tour du petit groupe que nous formons, s’attarde devant Camélia pour la reluquer, puis s’arrête à nouveau devant Jeremy. 

- T’as quel âge gamin ? 
- Quatorze. 

Le môme garde son aplomb et bombe le torse fièrement, sourire en coin. 

- Depuis quand t’engages des mioches Tidji ? 
- Laisse-le tranquille Neil. C’est lui qui a voulu venir. Et puis je n’ai engagé personne. Je ne suis pas responsable de lui. 
- Qui alors ? Tu sais pourtant bien que je ne traite qu’avec les responsables, et non avec les sous-hommes. 

Tidji sert les dents, retenant une réplique acerbe. 

- Ce… c’est Xalyah, lâche-t-il au bout d’un moment. 
- Qui ça ? 

Je foudroie Tidji du regard. Il n’a jamais été question que je sois responsable de qui que ce soit ici. Mais pour ne pas empirer la situation je fais un pas en avant. Neil me regarde des pieds à la tête et s’avance vers moi.

- Alors mignonne, qu’as-tu à me proposer pour ce petit bolide ? 
- Deux milles YES. 
- Deux milles ? Te fous pas de ma gueule, tu sais que ça veut beaucoup plus, d’autant plus que c’est le dernier modèle. 
- Et ? 

Je croise les bras et reste impassible devant l’homme qui commence à bouillir devant moi. 

- Et… deux milles YES c’est ridicule comme prix. Ce Crossover en vaudrait au moins trente milles en temps normal. 
- Deux mille cinq cents alors ? 

Neil s’avance vers moi l’air menaçant. 

- Me prend pas pour un con. Je ne descendrais pas en-dessous de quinze mille. 
- Trois milles. C’est tout ce qu’on a de toute façon. 
- Te paye pas ma tête. Vous êtes huit. 
- Je ne vois pas le rapport. Nous n’avons que trois mille alors c’est à prendre ou à laisser si tu veux te débarrasser de ce Crossover. 
- Je ne veux pas me déb… Mais d’où tu sors toi ! C’est pas comme ça qu’on négocie normalement. 
- Ne m’engage pas sur le débat de la normalité, on va y passer des heures sinon. 

Neil fronce le nez, et derrière ces lunettes noires je l’imagine fixant le ciel gris pour réfléchir. Je sais qu’il veut se débarrasser de ce Crossover. Tout dans son attitude me crie qu’il a besoin de fric tout de suite. Et dans ces cas-là, trois mille c’est mieux que zéro. Et honnêtement, je ne pense pas qu’il réussisse à vendre ce bolide pour quinze milles YES. Personne n’aurait une telle somme à dépenser pour ça. Ses épaules se voûtent un peu, et ses doigts jouent avec un bouton de son manteau. 

- Quatre milles ? demande-t-il dans un dernier espoir. 
- Trois milles et pas un centime de plus. 
- Bien… bien… marché conclu, soupire-t-il. Je ne prends que du cash. 
- Ce n’est pas un problème. 

Je sors six billets de cinq cents de mon portefeuille. Il doit me rester un peu plus de mille YES. Les temps sont durs, et à ce rythme-là je vais avoir de sérieux problèmes. 

- Bon et bien à plus la compagnie alors, s’écrie l’homme en repartant d’un pied ferme vers la moto. 
- Neil… déclare Tidji sur un ton de reproche. 
- Quoi ? 
- Tu n’oublies pas quelque chose ? 
- Si j’oublie… Ah oui ! Excuse-moi vieux ! Où avais-je la tête. 
- On se le demande, marmonne Tim qui avait réussi à garder sa langue dans sa poche jusqu’à maintenant. 

L’homme chauve fouille dans son manteau puis envoie en l’air les clefs de la voiture. Tidji les attrape au vol et fait un signe de tête à Neil. 

L’autre homme armé d’une mitraillette n’avait pas bougé de tout l’entretien. Alors que Neil arrive à sa hauteur, il enfourche la moto et fait vrombir le moteur. Son acolyte s’assoit derrière lui, et les deux hommes déguerpissent à toute allure.

Bilan (accompagné de roulements de tambour) :

Ce n'est pas flagrant et "y a encore du taff !" comme dirait l'autre, même si j'ai l'impression d'avoir un peu amélioré mes dialogues. Donc si je ne m'auto-envoie pas de tomates, les fleurs seront néanmoins pour une autre fois.

Tout ça pour savoir est-ce que ça vaut le coup d'éditer mes épisodes avec la nouvelle version pour continuer l'histoire ici ? Ouvrir un autre blog ? Un site en parallèle de ce blog-ci ?

Si vous avez un avis sur la question ça m'intéresse.

dimanche 3 février 2013

Destins croisés - Episode 14



***

Je me réveillai un peu plus tard dans la journée. L’une des prisonnières était penchée au dessus de moi, et essuyait le sang qui avait coulé le long de ma tempe. Je l’observai un moment, les paupières mi-closes ; elle devait approcher la trentaine, les cheveux châtains clairs attachés en queue de cheval, de grands yeux verts, des taches de rousseur rehaussant la ligne d’un nez fin, et une bouche pulpeuse. A n’en pas douter, elle aurait fait fureur dans mon monde. 

Voyant que je reprenais connaissance, elle s’écarta et se rassit contre les barreaux de la cage. Je regardais les autres prisonniers ; ils arboraient tous la même mine triste et fatiguée. Les femmes étaient vêtues de longues jupes et portaient une chemise ample serrée à la taille par une bande de tissus fin pour la plupart de couleur vive. Un fichu de la même couleur que leur ceinture retenait leurs cheveux en queue de cheval. Les hommes étaient vêtus à peu près de la même façon. A la place de la jupe, ils portaient un pantalon rentrés dans des bottes en tissus ou en cuir qui s’arrêtaient à mi-mollet. Ils avaient tous le teint hâlé, comme s’ils avaient l’habitude d’être exposé au soleil. 

- Où nous emmènent-ils ? demandai-je d’une voix pâteuse. Que vont faire ces hommes de nous ? 
- Tu n’as jamais entendu parler des Enleveurs ? s’étonna la femme qui s’était penchée au-dessus de moi, en insistant sur le dernier mot. 
- Des enleveurs ? répétai-je. Qu’est-ce que c’est ? 
- Cela fait plusieurs mois qu’ils courent la campagne pour enlever les paysans, répondit un jeune homme aussi épais qu’une brindille. 
- On raconte qu’ils les emmènent jusqu’à la frontière sud, et qu’ils les vendent comme du bétail aux Dabaïens. C’est le sort qui nous attend, chuchota une femme brune en frissonnant. 

Je me redressai péniblement et agrippai les barreaux de la cage, qui tanguait sous l’impulsion des grandes créatures. Des Enleveurs ? Se faire vendre à des Dabaïens ? Dans quelle merde étais-je ? J’observai longuement les hommes qui encadraient le convoi. Ils étaient tous taillés dans le roc, et leur attitude agressive me dissuadait de tenter quoique ce soit frontalement. De plus, ils avaient l’air plutôt organisés. De temps en temps, deux d’entre eux partaient devant en reconnaissance. Ils revenaient une heure plus tard en hochant la tête positivement. Cinq autres hommes encadraient étroitement le convoi, et les derniers s’espaçaient d’une cinquantaine de mètres pour surveiller les environs, si bien que la plupart du temps je les perdais de vue, pour les voir réapparaitre de temps en temps dans les sous-bois alentour. Je devrais la jouer fine si je voulais me sortir de ce mauvais pas. Lasse de les regarder, je ramenai mes genoux contre ma poitrine en soupirant. Merci Erick. 

- Comment t’appelles-tu ? demanda alors la femme aux cheveux châtains. 
- Eléonaure. Et toi ? 
- Eléonaure ? Ce n’est pas commun. Je m’appelle Sarizine, et je viens du village de Tenezco. Et toi d’où viens-tu ? ajouta-t-elle alors que je gardais le silence. 
- Pari, répondis-je d’une voix lointaine. 
- Pari ? Où est-ce ? demanda un jeune homme aux cheveux couleur carotte. 
- Loin. A des années lumières d’ici. 

Devant mon air maussade les questions s’arrêtèrent. Je sentais les regards pesés sur moi. Accoutrée comme je l’étais et la peau blanche, j’intriguais tout le monde. Je fermai les yeux et tentai de faire le vide dans mon esprit.

Et voilà le work in progress terminé.